Fès envoyé spécial
Je m'appelle Abdelkhalek Boukhars mais on me surnomme Abdou. Je suis le gardien du palais al-Glaoui et le descendant d'une famille berbère de Telanat, près de Ouarzazate. Mon grand-père est arrivé il y a cent ans à Fès. Il était le représentant du pacha Glaoui dans la ville. Il s'occupait de ses affaires, c'est lui qui dirigeait le palais quand le pacha n'était pas là. Il avait même procuration écrite. Mon grand-père, comme le Glaoui, appartenait aux tribus ghaouas qui existent depuis le XVIIIe siècle. Ces tribus sont dirigées par sept grandes familles et la septième était celle du Glaoui, qui était un chef militaire, politique et spirituel.
Je suis né en 1951 dans le palais du Glaoui. C'était avant l'indépendance. Sous le protectorat, c'était le pacha et les gens de tribus qui gouvernaient. Le Glaoui Thami était l'allié des Français (1). Il avait quatre femmes et le palais avait un harem : chaque femme avait droit à un certain nombre de concubines pour la servir. Il y avait même une école coranique dans le palais. Ma mère n'a jamais quitté le palais entre le jour de son mariage, dans les années 40, et l'indépendance en 1956. Elle était heureuse, elle ne manquait de rien. Elle a même fait le pèlerinage à La Mecque avec la grand-mère de l'actuel roi. C'était la belle époque.
Chance. Après la mort du pacha, ça a été la mort du palais. Les biens du Glaoui ont été confisqués un certain temps. Nous, on vivait là comme chez nous, alors on est restés. Pendant les qu