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Libération
Critique

Coquine Agrippine

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publié le 23 septembre 2003 à 1h05

C'était il y a deux ans au Théâtre des Champs-Elysées. René Jacobs, le contre-ténor, chef et musicologue gantois, qui s'est imposé en vingt ans comme un artisan précieux de la révolution baroque, exhumait Agrippina, le premier chef-d'oeuvre de Haendel, composé à 25 ans, dans une production cynique et loufoque de David McVicar. Coproduite avec le Théâtre de la Monnaie de Bruxelles, cette Agrippina euphorisante revient avenue Montaigne pour quatre représentations.

Une fête de musique tout d'abord, grâce au riche écrin de timbres et couleurs (trois clavecins, orgue, luth, violoncelle) du Concerto Köln et à la direction vive, tout en contrastes dynamiques d'un Jacobs ne sacrifiant jamais au beau son, son idéal de théâtre musical. Une fête de l'humour aussi, tant la transposition scénique par McVicar de ce Dallas antique à l'ère CNN sonne actuelle. L'arrivée des généraux, chorégraphiée par Andrew George, évoque le Mel Brooks des Producteurs. Néron, fils de la rousse Agrippine, ressemble à un techno-kid en Carhartt et cheveux peroxydés, ayant retenu les attitudes et les gestes les plus significatifs du grunge et du rap, mais est surtout chanté par la jeune mezzo suédoise Malen Ernman. Androgyne au milieu de colonnes bleutées, ou à l'ombre d'un gigantesque détail de nu, cette rivale encore inconnue d'Anne Sofie Von Otter ou Vesselina Kasarova est à elle seule une sérieuse raison d'aller suivre pendant quatre heures les intrigues sophistiquées et trash de cette grosse coquine d'Agrip