Plutôt que de regagner sa cellule de la prison d'Arles après sa
dernière permission de sortie, René Page s'est fait la malle au Portugal. Depuis 1995, il multipliait les demandes de libération conditionnelle. Après un ultime refus, en octobre 1999, il a imaginé un autre scénario, l'a même écrit. «Très vraisemblablement, quand vous lirez ces lignes, j'aurai cherché à quitter le territoire français lors de cette permission de sortie la seizième , et réclamé asile et protection dans un Etat, le Portugal, où il me sera permis de dénoncer aux autorités judiciaires et administratives les atteintes discrétionnaires et arbitraires dont je suis victime», dit la lettre envoyée à quelques organes de presse au moment de sa fuite. C'était le 27 mars, à 18 heures. Avec 2000 francs en poche pour assurer ses «frais divers», le permissionnaire de 44 ans devait se rendre à un rendez-vous au centre de formation professionnelle pour adultes (CFPA) de Marseille. «Motif: préparation à la réinsertion sociale», indique l'ordonnance de permission exceptionnelle signée par le juge. René Page devait être de retour en prison le lendemain à 18 heures.
Obsession. «Ça va. Je vis chez Emmaüs. J'ai découvert qu'il y a des foyers Emmaüs au Portugal aussi», dit-il. Pas un mot sur la mer, le charme des ruelles escarpées ou les odeurs de poisson grillé. L'ex-gamin de la Ddass, qui a vécu en cellule depuis l'âge de 20 ans, n'a qu'une obsession: parler de toutes les «injustices» et de tous les «abus de pouvoir