Douai envoyée spéciale
Paru le 5 février 2005
C'est un homme sans expression. Durant les trois jours de son procès, il n'a pas eu une ride de contrariété, ni un froncement de sourcil, ni même une lueur dans son regard. A chaque fois qu'il devait parler, cet homme corpulent s'est levé avec docilité et a marmonné quelques mots d'une voix rendue pâteuse par les médicaments. Joël Damman, 50 ans, était jugé devant la cour d'assises de Douai pour le meurtre de Mohamed Maghara, un jeune homme de 17 ans, et la tentative d'assassinat de seize personnes, dans la banlieue de Dunkerque en 2002. Il avait décidé de «faire peur aux Arabes», de leur «montrer ce qu'un Français peut avoir dans le pantalon». Il a voulu «faire un tableau, comme à la chasse». Il a été condamné, vendredi, à vingt-cinq ans de réclusion, presque autant que les trente ans requis par l'avocat général. C'était un vendredi, le 4 octobre 2002. Vers 20 heures, à son domicile de Coudekerque (Nord), Joël Damman prend deux de ses fusils. Monte à bord de son 4x4 vert, dont il a dissimulé les plaques d'immatriculation. S'est coiffé d'une casquette foncée et, selon plusieurs témoins, porte des lunettes de soleil et une barbe. Il se rend dans le quartier de la Petite Synthe, à quelques kilomètres. Sur le chemin, il interpelle deux adolescents pour savoir s'ils sont français. «Sûrs ?» dit-il en tapotant son fusil. Puis se dirige vers le café Aux mouettes, s'approche d'un groupe de trois Maghrébins qui discutent sur le trottoir.