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Chronique Ré/jouissances

A l’écran, mieux vaut tuer que faire l’amour

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Chronique «Ré/Jouissances»dossier
Les fictions multiplient les cadavres et s’entichent des serial-killers en toute innocence, tandis que la représentation de la sexualité la plus banale est désormais sous surveillance.
La série «Peaky Blinders» est aussi sanguinolente que d’excellent niveau. (Matt Squire/Collection Christophel)
publié le 18 octobre 2022 à 0h07

Est-ce juste une impression ? Dans les fictions, il me semble que Thanatos trucide Eros avec une délectation de tous les instants. J’ai le sentiment que les cadavres prolifèrent à l’image, que les meurtres infestent le moindre scénario, tandis que les libidos se cachent pour mourir et les baisers pour voler. Les plaies ouvertes paraissent moins perturber que le dévoilement impromptu d’un téton. Les tueurs en série deviennent des héros noircis à la suie du mal endémique, des êtres répulsifs qui doivent à la répétition de leurs crimes métaphysiques une faveur tremblante. Cette fascination dolente fait frissonner le spectateur pelotonné dans son confort douillet pour mieux se glisser épouvanté dans les bras de Morphée. Cette recrudescence des égorgements et des éviscérations tient évidemment à la guerre des plateformes numériques qui investissent dans les angoisses serre-kiki, certaines que la mort fait vendre et que les mauvais sujets font de bonnes histoires. Effectivement Peaky Blinders et le Serpent, l’Assassinat de Gianni Versace et The Fall sont aussi sanguinolents que d’excellent niveau comme le sont paraît-il Game of Thrones et le Seigneur des anneaux.

Ce maelstrom de tortures et d’éventrements est-il un simple relais de croissance ? Cette profusion de stimulis mortifères et de détumescences morbides raconte-t-elle autre chose qu’une conquête de parts de marché ? Pourquoi l’époque regarde-t-elle sans ciller le sanglant tandis que le ban