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Interview

Annie Ernaux: «C’est un devoir de prendre position»

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Mélenchon candidat à la présidentielle 2022dossier
L’écrivaine, soutien de Jean-Luc Mélenchon, ne conçoit ni l’écriture ni l’existence sans engagement. Emmanuel Macron, mépris de classe, banlieue, livres, féminisme: l’action politique fait partie de moi, dit-elle.
Annie Ernaux, chez elle, à Cergy, en novembre. (Patrick Swirc/Modds)
publié le 6 mars 2022 à 7h00

Annie Ernaux n’a baissé son masque qu’à la fin. «Il faut bien que vous voyiez mon visage.» Jusque-là, elle avait parlé autour d’une table, un frelon qui cogne sur sa fenêtre, laquelle donne sur un étang – pile comme on imagine une maison d’écrivaine célèbre. Elle écrit là, à Cergy, dans le nord de Paris. Une maison au bout d’une rue, au fond d’un jardin, qu’elle semble occuper depuis des siècles. Une cuisine colorée, où elle prépare les cafés et s’enquiert de nous comme si nous passions le boire tous les lundis.

L’écrivaine, professeure de formation, est l’une des références du féminisme français. Depuis les années 70, elle raconte le monde qui l’entoure au travers de sa propre expérience de «fille, s’étant heurtée au mépris social et à la domination masculine». On l’a rencontrée pour discuter de politique, de gauche et à la vérité, de tout. Elle fut longtemps connotée autrice misérabiliste, renvoyée de fait à son enfance modeste à Yvetot, en Normandie. Avant d’acquérir un trône littéraire et une stature internationale. A 81 ans, elle a un pied enfourné dans chaque époque. Annie Ernaux est à la fois une mémoire unique de luttes passées, comme elle est une source d’inspiration pour des militants du moment – sur le genre, les classes sociales, l’égalité.

Cet hiver, elle a publiquement affiché son soutien à Jean-Luc Mélenchon, candidat insoumis à la présidentielle. Sur sa bibliothèque remplie à ras bord, elle prévient que ces bouquins ne sont qu’un échantillon : la