Forces de l’ordre dans les universités, convocations à raison d’expressions publiques sur le conflit au Moyen-Orient, interdictions de manifester en soutien au peuple palestinien : l’instrumentalisation de plus en plus débridée de la notion d’ordre public et du délit d’apologie du terrorisme – parfois réduits au rang de pur prétexte – sont le résultat d’une décennie d’atteintes continues aux équilibres fondateurs de notre droit et de notre procédure pénale.
Le Syndicat de la magistrature n’a eu de cesse de dénoncer les travers prédictifs des réformes qui se sont succédé depuis la loi dite «antiterroriste» du 13 novembre 2014. Celle-ci avait soustrait les délits d’incitation et d’apologie au régime du droit de la presse pour les faire entrer dans le droit commun. En permettant de recourir à la comparution immédiate et au mandat de dépôt pour des infractions d’expression, cette réforme avait non seulement abîmé la loi de 1881, mais aussi établi une équivalence de gravité entre le traitement procédural de certaines expressions et celui d’actes de délinquance.
Si les effets pervers de l’affaiblissement de cette distinction ne cessent de s’amplifier, c’est aussi par l’effet de la montée en puissance d’un droit pénal de prévention. Avec