Des personnalités de la société civiles réagissent au risque de voir l’extrême droite arriver au pouvoir.
«Soit la gauche joue l’union coûte que coûte, et elle n’est même pas sûre de remporter l’élection, soit elle juge que c’est mort, et alors l’échéance va se passer ailleurs, dans la rue. Or le rapport de force dans la rue a montré que c’était tout le temps perdant. L’union de la gauche s’impose à n’importe quel prix, et toute personnalité de gauche qui refusera l’union le fera au nom de sa propre stratégie. C’est un saut dans l’inconnu, car on n’est même pas sûr que la stratégie de l’union soit valable à la fin dans les urnes. Il y a un côté improvisation totale.
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«On sent quand même que ça va être difficile de refaire dialoguer les gauches. Dimanche 9 juin au soir, j’étais à République. J’ai entendu un slogan qui dit : “A bas l’Etat, les flics et les fachos !” un truc comme ça. Un slogan assez basique qu’on entend souvent en manif. Deux filles à côté de moi ont commenté : “Ah, c’est un peu anarchiste quand même.” On sent que la culture politique a un peu divergé ces derniers mois, et que ça ne va pas être évident. Plus aucune question de personnalité ne doit être envisageable, plus aucun calcul stratégique. L’équation est à la fois complexe et simple. Il faut absolument que le RN ne gagne pas et qu’Emmanuel Macron ne puisse pas s’en sortir.
Des airs de Napoléon III
«La formule “Front populaire”, lancée par François Ruffin, est adaptée au moment. Elle est hyperclaire, on sait pourquoi elle a existé, quelles étaient les menaces à l’époque. Je ne dis pas ça pour dédouaner Emmanuel Macron, mais je ne trouve pas totalement absurde d’articuler la politique nationale aux élections européennes. La dernière fois que le contexte international a été aussi merdique, c’était pendant la guerre d’Espagne. A cette époque, ce qu’il se passait dans le monde pouvait avoir d’importantes répercussions en France. Malgré les tentatives confusionnistes de Michel Onfray, les gens voient encore à peu près ce qu’est le Front populaire : l’union des gauches contre la menace de l’extrême droite et le risque de guerre mondiale. Il y a aussi un contenu : les congés payés, la réduction du temps de travail… Ça nous ramène un peu à la loi retraite.
«Avec la dissolution, Emmanuel Macron se donne des airs de Napoléon III. Il veut être la figure autoritaire qui nous sauvera des autoritaires méchants, le Rassemblement national. Il ne va pas se faire proclamer empereur, mais on sent que derrière le projet, c’est ça : il y a une demande d’autorité, ce pays veut un chef, et c’est lui qui l’incarnera à merveille. C’est un moment bonapartiste de son point de vue. C’est sûrement foireux mais je pense que c’est le calcul.»