Faut-il contraindre les médecins à s’installer dans les déserts médicaux ?
La France ne sera-t-elle bientôt plus qu’un désert médical ? A l’exception d’un Sud-Est plutôt épargné, plus de 60 % des bassins de vie, région parisienne incluse, sont touchés par un accès limité à la médecine généraliste. En cause, la liberté d’installation des généralistes, datant de 1921, mais aussi le maintien jusqu’en 2021 du numerus clausus limitant le nombre de médecins formés. Débattue ces jours-ci à l’Assemblée, la loi de financement de la Sécu pour 2023 entend lutter contre cette pénurie, mais un article suscite l’ire des étudiants en médecine. Il prévoit l’instauration d’une 4e année d’internat pour les futurs généralistes, qui se déroulerait «en priorité dans des zones où la démographie médicale est sous-dense». Sous la houlette de l’intersyndicale, ces internes ont manifesté vendredi, pour en demander le retrait. Pourtant, certains, comme l’avocate Corinne Lepage, veulent aller plus loin : pour eux, l’ampleur de la crise actuelle nécessite de mettre fin à la liberté d’installation des médecins. A l’inverse, pour le créateur de la série télé «Hippocrate», ex-médecin, il serait injuste de faire peser le poids de quarante ans de carence des politiques de santé sur les seuls médecins.
En février 2022, le Conseil d’Etat a rejeté le recours déposé par l’Association des citoyens contre les déserts médicaux, défendue par l’avocate Corinne Lepage, qui réclamait une intervention plus forte de l’Etat dans la lutte contre les zones vides de docteurs, au motif «qu’il ne reconnaissait pas la carence sanitaire liée au désert médical». Pour la présidente de Cap 21 et ancienne candidate à l’élection présidentielle, l’inefficacité des mesures incitatives existantes nous contraindra sans doute à devoir imaginer, en concertation avec les professionnels, des solutions plus contraignantes.
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Etes-vous favorable à la fin de la liberté d’installation des médecins ?
Oui, même si une telle contrainte est contraire à la tradition de la médecine libérale. Le code de déontologie médicale prévoit, lui, d’assurer la continuité des soins, quelles que soient les circonstances… or aujourd’hui, sept à huit millions de Français ont un accès limité à un médecin généraliste ! On arrive à un tel état de déstructuration de la géographie médicale qu’il ne reste plus tellement de solutions. C’est le résultat de décennies de stupides