Place à la France métisse. Dans une enquête de terrain fouillée intitulée Derrière le mythe métis. Enquête sur les couples mixtes et leurs descendants en France (la Découverte, février 2024), la sociologue Solène Brun décrypte l’évolution de la condition métisse dans l’Hexagone, plus revendiquée et conscientisée aujourd’hui qu’hier. Et démontre, derrière les discours parfois iréniques sur l’ouverture à l’altérité, l’amour et le mélange, la persistance de logiques de domination raciale dans l’espace intime et familial.
Vous écrivez : «La race n’existe pas, mais le métissage est partout.» Que voulez-vous dire ?
Nous vivons dans un pays censé ne pas parler de «race» et où on ne fait pas de différence entre les individus. Pourtant, les musiques, la cuisine, les pubs, la beauté… tout est métis ! Ces discours mélioratifs, développés dès les années 80, sont une manière de parler de «race» de manière détournée, sans se confronter à la persistance des inégalités qui en découlent. C’est ce que j’appelle le «mythe métis». En 1998, la victoire des Bleus [lors du Mondial de football, ndlr], de la France «black blanc beur», faisait dire aux politiques de droite comme de gauche que le racisme, c’était du passé. Même chose en décembre 1999 avec l’élection de Sonia Rolland comm