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Interview

Couples mixtes et métissage : «L’amour n’est pas un antidote au racisme»

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La sociologue Solène Brun revient sur les couples français mixtes, qui n’échappent pas aux logiques de domination sociale, et sur leurs enfants qui, de leur prénom à la transmission de la langue, sont «racialement socialisés».
Solène Brun démontre, derrière les discours parfois iréniques sur l’ouverture à l’altérité, l’amour et le mélange, la persistance de logiques de domination raciale dans l’espace intime et familial. (Philippe Lissac/Godong. Getty Images)
publié le 6 avril 2024 à 6h47

Place à la France métisse. Dans une enquête de terrain fouillée intitulée Derrière le mythe métis. Enquête sur les couples mixtes et leurs descendants en France (la Découverte, février 2024), la sociologue Solène Brun décrypte l’évolution de la condition métisse dans l’Hexagone, plus revendiquée et conscientisée aujourd’hui qu’hier. Et démontre, derrière les discours parfois iréniques sur l’ouverture à l’altérité, l’amour et le mélange, la persistance de logiques de domination raciale dans l’espace intime et familial.

Vous écrivez : «La race n’existe pas, mais le métissage est partout.» Que voulez-vous dire ?

Nous vivons dans un pays censé ne pas parler de «race» et où on ne fait pas de différence entre les individus. Pourtant, les musiques, la cuisine, les pubs, la beauté… tout est métis ! Ces discours mélioratifs, développés dès les années 80, sont une manière de parler de «race» de manière détournée, sans se confronter à la persistance des inégalités qui en découlent. C’est ce que j’appelle le «mythe métis». En 1998, la victoire des Bleus [lors du Mondial de football, ndlr], de la France «black blanc beur», faisait dire aux politiques de droite comme de gauche que le racisme, c’était du passé. Même chose en décembre 1999 avec l’élection de Sonia Rolland comm