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Entretien

Didier Eribon sur le vote des classes populaires pour le RN : «On est passé de “nous les ouvriers” à “nous les Français”»

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Le sociologue, qui décrit dans ses livres le lent basculement du vote communiste des ouvriers vers un vote d’extrême droite depuis les années 90, analyse pour «Libération» le «nouvel espoir» suscité par l’alliance de la gauche.
(Matthias Aregui/Libération)
publié le 22 juin 2024 à 8h52

Pour les Allemands, il est «celui qui avait prédit le tremblement de terre.» Voilà comment le sociologue français Didier Eribon était décrit dans l’hebdomadaire Die Zeit en février, qui cherchait à comprendre le succès de l’extrême droite dans les sondages. Son livre Retour à Reims (Fayard, 2009), best-seller traduit en allemand en 2016, s’est vendu à 100 000 exemplaires outre-Rhin. Eribon y décrit de manière sensible la conversion des ouvriers communistes à l’extrême droite en France, en prenant pour exemple l’histoire de sa propre famille dont il avait fui l’homophobie dans sa jeunesse.

Comment analysez-vous la situation politique actuelle et dans quelle mesure le Nouveau Front populaire a-t-il des chances de remporter ces élections ?

Tout d’abord, je tiens à dire que je soutiens totalement la mise en place de ce Nouveau Front populaire. La grande nouvelle, c’est que face au danger, la gauche ne s’est pas contentée d’adopter une position défensive, elle a inventé une nouvelle alliance, un nouveau programme, et suscite donc un nouvel espoir. Ce Front populaire sera d’autant plus puissant qu’il ne se réduira pas à un accord électoral entre des appareils politiques. C’est un rassemblement beaucoup plus large qui est en train de se produire, avec des syndicats, des associations, des mouvements antiracistes, écol