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Libération
L'édito d'Alexandra Schwartzbrod

A Gaza, l’horreur à huis clos

Guerre au Proche-Orientdossier
Dans l’enclave palestinienne, où les civils n’en finissent pas de payer les massacres commis par les terroristes du Hamas, Israël empêche tout accès aux médias, menant ainsi une guerre loin des regards.
Le corps d'un enfant tué dans un bombardement israélien à Khan Younès, dans la bande de Gaza, le 22 janvier. (Mohammed Dahman/AP)
publié le 2 février 2024 à 20h56

Près de quatre mois après le 7 octobre, la population civile palestinienne n’en finit pas de payer les massacres commis par les terroristes du Hamas en Israël. Les bombardements quotidiens de l’armée israélienne, qui ont déjà fait plus de 27 000 morts, réduisent jour après jour l’enclave à l’état de ruines sous lesquelles seraient ensevelis un nombre indéterminé de cadavres, et la population ne cesse de reculer, fuyant toujours plus vers le sud en quête d’un illusoire abri. Privée de tout, d’électricité, de chauffage, de médicaments, de nourriture, d’eau potable, d’Internet, elle en est réduite à vivre comme au XIXe siècle, se déplaçant en charrettes et se protégeant du froid en brûlant des meubles sortis des gravats. Beaucoup n’ont plus ni passé ni avenir, et se débrouillent comme ils le peuvent avec le présent. Et cette tragédie a lieu à huis clos. Les autorités israéliennes interdisent aux journalistes étrangers d’entrer dans Gaza, officiellement pour leur sécurité, et autorisent uniquement les reportages cornaqués par Tsahal qui ont un intérêt limité, tandis qu’à Rafah, les Egyptiens bloquent aussi les médias.

L’objectif affiché par le cabinet de guerre israélien est d’«éradiquer» définitivement le Hamas mais, si plusieurs milliers d’hommes du mouvement ont semble-t-il été tués et un grand nombre de souterrains neutralisés, les deux leaders de la branche militaire seraient toujours vivants. Les buts déclarés par Benyamin Nétanyahou n’ont donc pas été atteints. D’où l’intensité accrue des bombardements alors que persistent les rumeurs d’une possible trêve. Les dirigeants israéliens savent qu’ils n’ont plus beaucoup de temps devant eux. Certes, les ministres d’extrême droite menacent de quitter le gouvernement en cas d’arrêt des combats – ce qui fragiliserait la survie politique du Premier ministre –, mais le précieux allié américain ne peut se permettre d’aborder la phase active de la campagne électorale au son des canons sur l’enclave. Et même s’il y avait une trêve, cela ne résoudrait pas le problème de fond : comment offrir un horizon aux survivants de Gaza ?