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Libération
Edito

Accusation de viol contre Sofiane Bennacer : rien n’a changé là où tout a commencé ?

Alors que notre enquête montre que la production des «Amandiers» était au courant des accusations de viols et violences contre l’acteur, il est insensé que rien n’ait été fait. D’autant plus dans le milieu du cinéma, où le mouvement #MeToo a explosé.
Aux abords de la Maison des arts de Créteil, où le théâtre des Amandiers a été recréé pour le tournage, le 5 juillet 2021. (DR)
publié le 25 novembre 2022 à 5h14

Les affaires de violences sexistes et sexuelles que nous avons dénoncées jusqu’à présent (Patrick Poivre d’Arvor, Gabriel Matzneff, Olivier Duhamel…) remontaient en général à plusieurs années, voire décennies, à un temps où le respect des femmes n’allait malheureusement pas encore de soi. Depuis 2017 et l’affaire Weinstein, qui a donné de l’ampleur au mouvement #MeToo, chacun sait ce qu’il risque s’il ose une parole ou un geste déplacé, ou s’il continue à employer quelqu’un soupçonné d’avoir agressé une ou plusieurs femmes. A fortiori dans le milieu du cinéma, là où tout a commencé. Ce qui s’est déroulé sur le tournage des Amandiers, le long métrage réalisé par Valeria Bruni-Tedeschi, en salles depuis le 16 novembre, paraît donc insensé.

Dès les auditions, l’équipe entend parler d’accusations de viols contre Sofiane Bennacer et pourtant le comédien est engagé pour un premier rôle (le problème aurait été le même pour un rôle secondaire, d’ailleurs). Les producteurs apprennent quelques jours après le début du tournage que Bennacer est l’objet d’une plainte pour «viol» et… rien ne se passe. Certes, la cinéaste s’arc-boutant sur son choix du comédien, il était sans doute très compliqué de lui faire entendre raison, sauf à faire voler en éclats un projet qui mobilisait du monde et de l’argent. La présomption d’innocence avancée par Valeria Bruni-Tedeschi ? Bien sûr, elle est importante, il ne s’agit pas de condamner sur la foi d’une simple rumeur, il est juste conseillé de mettre la personne incriminée à l’écart le temps qu’une enquête soit menée. Les témoignages des femmes que nous publions aujourd’hui sont trop graves pour être balayées d’un «circulez, y a rien à voir».