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Libération
L'édito d'Alexandra Schwartzbrod

Addiction aux écrans: être vigilant, mais ne pas dramatiser

Le temps passé devant la télévision, l’ordinateur ou le smartphone a de quoi inquiéter, et les enfants ne sont d’ailleurs pas les seuls concernés. Mais culpabiliser ne résoudra rien, et le problème est loin d’être insoluble.
A l’hôpital pour enfants de Nice, l’an dernier, 30 % des ­consultations en addictologie ­concernaient les écrans. (Gilles Coulon/Tendance Floue/Gilles Coulon/Tendance Floue)
publié le 15 mars 2024 à 19h42

On a commencé à s’inquiéter quand on a appris que les géants de la Silicon Valley interdisaient les écrans à leurs enfants, du moins en limitaient l’usage. Si les Steve Jobs, Bill Gates ou Mark Zuckerberg, ceux-là mêmes qui les avaient conçus, se méfiaient de ces pièges à concentration, alors comment regarder sans culpabiliser sa progéniture vissée devant Tiktok ou le dernier jeu vidéo pendant que le dîner se prépare ? Et d’ailleurs comment s’assurer, quand les deux parents travaillent et rentrent tard, que les enfants ou ados n’allument pas l’écran à peine sortis de l’établissement scolaire, sautant l’étape des devoirs ?

Ce qui n’était au début qu’une inquiétude a pris de l’ampleur au fil des années, au point de devenir un problème de santé publique pris très au sérieux en France par le chef de l’Etat. Des experts doivent se prononcer sur le sujet d’ici au printemps et le Premier ministre envisage d’ores et déjà un «verrou numérique» qui empêcherait l’accès des moins de 13 ans aux réseaux sociaux. Enfants et ados sont devenus accros aux écrans, fascinés par ce monde virtuel qui meuble leur solitude, leur ennui ou leurs angoisses. Et l’on ne peut guère leur jeter la pierre vu que nous-mêmes scrollons jusqu’à des heures indues pour oublier les guerres, les morts, les invectives, les maladies et la misère. Donnant un piètre exemple à ceux qui nous regardent comme des modèles à suivre.

Alors, comment sortir de ce piège infernal ? D’abord cesser de culpabiliser. Les écrans existent, ils sont partout, y compris à l’école, chacun fait comme il peut, il faut apprendre à les apprivoiser. Prendre conscience du danger, c’est déjà en tenir compte. Et surtout ne pas passer d’un extrême à l’autre, d’un lâcher prise à une interdiction totale qui aurait un effet désastreux, proposer plutôt des alternatives sportives ou ludiques. Et se dire que les écrans n’ont pas empêché le succès phénoménal d’Harry Potter auprès des préados et que ceux-ci, mine de rien, sont sans doute bien plus débrouillards que ne l’étaient les préados du siècle dernier.