Ça y est ? L’a-t-on enfin notre «#MeToo à la française» ? L’affaire Gérard Depardieu, remise au cœur du débat public par Complément d’enquête et les images inédites de l’acteur libidineux sexualisant une enfant à cheval marquent-elles le tournant tant attendu dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles ? Nous aurons une première réponse ce jeudi 11 janvier devant les préfectures et palais de justice où sont appelés à manifester toutes celles et ceux qui défendent les droits des femmes. Puis celle de la justice qui poursuit son travail après les accusations portées par une quinzaine de femmes à l’encontre de l’acteur, visé par trois plaintes pour viol et agression sexuelle et mis en examen.
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Mais comment mesure-t-on que la peur change de camp ? Que l’électrochoc espéré se produit ? Les difficultés des victimes à être entendues et les défaillances du système judiciaire peuvent continuer à faire désespérer. Mais voici au moins trois raisons d’être optimistes. Sur les tournages, les chantiers vont tous azimuts pour prévenir et déceler les violences, du casting aux soirées en passant par les coordinatrices d’intimité lors des scènes de sexe. Au-delà de cet écosystème, le mois qui vient de s’écouler démontre que le pays tout entier peut s’emparer du sujet des violences sexuelles. Du sommet de l’Etat (pitoyablement, on y reviendra), jusqu’aux cercles familiaux lors des fêtes de fin d’année. Chaque affaire crante un peu plus les enjeux dans les esprits. La société ouvre enfin ses yeux et ses oreilles, mais surtout, le «backlash» s’est inversé.
Enquête
Pour la première fois, c’est le vieux monde réactionnaire, adepte du déni, qui s’est pris le «retour de bâton» théorisé par Susan Faludi pour désigner la réaction violente d’une partie de la société face aux avancées des droits des femmes. Le manifeste appelant à «ne pas effacer [...] Gérard» s’est soldé par une pluie de contre-tribunes bien plus soutenues et le rétropédalage de bon nombre de signataires. Quant à la sortie d’Emmanuel Macron osant dire que Depardieu «rend fière la France», elle a suscité un tel rejet qu’il y aura, forcément, un avant et un après. Par l’indécence de ses propos et son impopularité, le Président a fait de cette affaire un tournant. Qu’il le veuille ou non.