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Libération
Edito

Allemagne : le bonheur des uns, le malheur des autres et une leçon pour la classe politique française

Elections en Allemagnedossier
Si les résultats de l’élection ne permettent pas de désigner un chancelier, les votes allemands se distinguent par le faible score attribué à l’extrême droite.
Plus de 60 millions d'Allemands étaient appelés aux urnes pour le scrutin. (Kay Nietfeld/Picture alliance)
publié le 26 septembre 2021 à 21h49

Fallait-il faire élire un chrétien-démocrate modéré ou un social-démocrate modéré ? Les 60,4 millions d’électeurs allemands appelés à voter dimanche ont donné une réponse tout aussi modérée, divisant leurs voix presque à égalité entre Armin Laschet (CDU) et Olaf Scholz (SPD). C’est une remontée inespérée du centre gauche allemand, galvanisé par un leader qui a misé sur des idées simples et pratiques, comme la hausse du smic, et mené une campagne sans erreur. Olaf Scholz est encore loin d’être chancelier, mais il peut au moins prétendre au titre, comme il n’a pas manqué de le faire moins de deux heures après les premiers résultats. Comme le bonheur des uns fait le malheur des autres, ce sont d’abord les Verts qui pâtissent de cette poussée sociale-démocrate. Leur candidate, Annalena Baerbock, a fait un mea culpa plein de dignité, prenant la responsabilité des erreurs qui ont plombé sa campagne. Avec moins de 15 % des suffrages, sa formation arrive avant le parti libéral, mais est très loin de ce que les écologistes pouvaient espérer. La claque cinglante a tout de même été réservée aux héritiers d’Angela Merkel.

Dans un discours bien moins digne et bourré de mauvaise foi, Armin Laschet a annoncé son intention d’essayer de former un gouvernement «pour éviter une coalition de gauche». Rien de trop personnel dans le verdict des urnes selon lui, comme il s’agissait avant tout de signaler «une soif de changement». C’est donc la faute à Angela Merkel, qui du coup pourrait encore rester en poste pendant plusieurs mois, avec le risque d’entraîner une paralysie européenne jusqu’au premier trimestre 2022. Ceux qui en France seraient tentés d’y voir un échec de la chancelière sont invités à considérer les piètres résultats de l’extrême droite qui, malgré la poussée populiste et xénophobe partout en Occident, n’arrive en Allemagne qu’à 10 %. C’est là un signe clair de la droiture politique, sociale et morale du public allemand, et notre classe politique ferait bien d’en prendre conscience avec une grande humilité.