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Libération
L'édito de Dov Alfon

Attentat au couteau à Paris : entre déni et folie

L’assaillant fiché S qui a tué un touriste et blessé deux passants samedi soir à Paris avait apparemment réussi à berner les autorités. Un flou dans lequel s’engouffrent trop rapidement les politiques français.
Un policier patrouille dans le périmètre de sécurité établi après l'attaque ce samedi. (Dimitar Dilkoff/AFP)
publié le 3 décembre 2023 à 20h55

Un couple de touristes se promène le soir autour de la tour Eiffel, comme rêvent de le faire des millions de romantiques dans le monde. Mais c’est précisément cette image idyllique de Paris que les islamistes rêvent de briser, et samedi soir, un assaillant déjà condamné pour association de malfaiteurs terroriste a réussi à passer l’acte. Armand Rajabpour-Miyandoab, un Français de 26 ans, a tué à coups de couteau et marteau un touriste allemand de 23 ans, et blessé deux autres passants aux cris de «Allah Akbar». Il a revendiqué l’attaque dans une vidéo postée en ligne quasi simultanément à son passage à l’acte et, s’exprimant en arabe, n’a pas fait mystère de ses motivations : «Nous n’avons pas oublié vos crimes contre les musulmans dans nos pays, surtout les femmes et les enfants.» Fiché S, il avait déjà purgé une peine de quatre ans de prison pour un projet terroriste avorté à temps. Il était suivi par les services de renseignement «pour islamisme radical et troubles psychiatriques», un combo explosif que l’on commence à ne connaître que trop.

«Il délire, mais sa folie ne manque pas de méthode», nous avait déjà avertis Shakespeare. Ainsi, Rajabpour aurait suffisamment berné les autorités pour les convaincre qu’il était repenti et déradicalisé, jouant sur plusieurs tableaux, convainquant son psychiatre qu’il n’a aucun besoin de traitement tandis qu’un juge aurait refusé à la DGSI une perquisition à son domicile. Les réactions politiques de ces dernières vingt-quatre heures en disent long sur cette volonté d’être rassuré malgré les faits, entre le RN qui crie automatiquement au laxisme et LFI qui n’y voit qu’une crise de la psychiatrie française. Ce fut presque un soulagement d’entendre soudain François Hollande, président de la République pendant les attentats de 2015, rappeler l’essentiel : «Face au terrorisme islamiste, nous devons rester ensemble, unis.» L’instrumentalisation d’un possible raté des autorités, comme le déni d’une menace islamiste bien présente, ne peuvent que nous mener à l’échec de prévenir les attentats suivants.