«Faire bloc» et rester «debout», a demandé Emmanuel Macron aux Français lors de son intervention télévisée après l’attentat qui a coûté la vie à Dominique Bernard, le professeur à Arras. Un attentat qui, sans qu’un lien direct puisse être à ce stade de l’enquête établi, intervient dans le contexte de guerre au Proche-Orient après l’attaque terroriste déclenchée par le Hamas dans le sud d’Israël le 7 octobre.
«Debout», les Français, à lire les témoignages recueillis par Libération ces derniers jours, semblent l’être. L’actualité triplement dramatique du moment (un attentat a également fait deux morts à Bruxelles cette semaine) est évidemment angoissante. Elle intervient dans un contexte économique et social déjà très tendu pour de nombreux ménages, inflation oblige. Et dans une période où la guerre en Ukraine, l’urgence climatique ou la crise sanitaire continuent de peser sur le moral. Mais «nous avons surmonté des tragédies, et nous allons surmonter celles-ci», témoigne un Français croisé dans l’Oise. Un son de cloche personnel, mais qui corrobore ce sentiment de maturité française ressenti par exemple après les attentats à Charlie Hebdo ou du 13 novembre 2015.
Bien sûr, la situation personnelle, le lieu d’habitation, grande ville ou campagne tranquille, le statut social, la confession, modifient l’impact de la fureur du monde sur l’état de chacun. Des stratégies pour s’en protéger sont aussi à l’œuvre, notamment vis-à-vis des médias. C’est peut-être le revers de cette résilience française : l’accentuation de la tendance inquiétante du «chacun dans sa bulle».
Reste la question du «faire bloc». La guerre au Proche-Orient, forcément clivante, est une épée de Damoclès au-dessus de cette unité nationale que le chef de l’Etat a appelé de ses vœux. L’intensification probable du conflit dans les jours qui viennent n’arrangera pas les choses. Mais force est de constater qu’en la matière, les débordements, excès et dérapages observés depuis quinze jours chez les responsables politiques, à l’extrême gauche, à droite comme à l’extrême droite, en passant par un Gérald Darmanin dont le sang-froid s’égare chaque jour davantage, contribuent à alimenter la division.