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Libération
L'édito d'Alexandra Schwartzbrod

Aux Etats-Unis, l’heure des comptes pour les démocrates

Élections américaines de 2024dossier
Après la réélection du républicain Donald Trump, il y a une semaine, le camp démocrate doit à présent tirer les enseignements de l’échec de sa candidate Kamala Harris, plombée notamment par le rejet de Joe Biden.
Mercredi 6 novembre à l'université Howard, à Washington, en marge du discours de défaite de la candidate démocrate Kamala Harris. (Nathan Howard/AP)
publié le 11 novembre 2024 à 19h45

Près d’une semaine après la victoire triomphale de Donald Trump, ses opposants sont partagés en trois groupes : ceux qui coupent tout (réseaux sociaux, télévision, radios, journaux), trop écœurés et effrayés par le chaos qui guette ; ceux qui cherchent à comprendre comment et pourquoi un homme raciste, misogyne, injurieux, obscène, entouré de complotistes, poursuivi pour agressions sexuelles, multipliant les fake news, et on en passe, peut être ainsi porté à la tête d’une démocratie ; et ceux qui se mettent en ordre de bataille, prêts à résister aux retours en arrière prévus par le leader républicain dès son entrée à la Maison Blanche. Mais tous ont une même interrogation : comment l’Amérique en est-elle arrivée là ? Et une certitude : le premier mandat de Donald Trump n’était donc pas un accident de l’histoire – le milliardaire a été réélu en connaissance de cause – mais bien le début d’une tendance de fond que les démocrates n’ont pas su percevoir. Celle, notamment, d’un maintien forcené des frontières, quelles qu’elles soient, entre les pays, entre les genres ou entre les races, comme nous l’explique l’écrivaine Siri Hustvedt. De nos reportages ressort le constat que l’adhésion à Donald Trump doit beaucoup au rejet de Joe Biden et de ce qu’il incarne, Kamala Harris comprise. Le milliardaire est paradoxalement vu comme plus proche du peuple quand la candidate démocrate incarnait l’élite au discours lissé, déconnecté du terrain. C’est le sénateur Bernie Sanders, figure de la gauche américaine, qui l’a le mieux résumé : «Il ne faut pas s’étonner que le Parti démocrate, qui a abandonné la classe ouvrière, s’aperçoive que la classe ouvrière l’a abandonné.» La question basique posée par Donald Trump aux Américains, «Vivez-vous mieux aujourd’hui qu’il y a quatre ans ?» – omettant de signaler que la guerre en Ukraine était passée par là, renchérissant le coût de l’énergie –, a sans doute été dévastatrice pour Kamala Harris qui assumait le bilan de Joe Biden. Reste à espérer que cette victoire du populisme servira de cas d’école à tous les démocrates en Europe et en France. Car on y trouve des germes qui pourraient bien se développer aussi de ce côté-ci de l’Atlantique.