Au fond, le constat est cohérent : la campagne électorale en cours montre une adhésion record aux idées de l’extrême droite en France et, parallèlement, la chaîne de propagande en continu CNews cartonne. Tout est raccord. Reste à élucider le mystère de la poule et de l’œuf, en d’autres termes, qui a engendré quoi : CNews a-t-elle contribué à faire prospérer les idées de l’extrême droite ou a-t-elle seulement surfé sur la vague un peu rance qui monte depuis quelques années en France ? Les deux se sont alimentés, CNews n’hésitant pas, sous la houlette de l’ultraconservateur Vincent Bolloré, à servir de rampe de lancement à Eric Zemmour lors de la dernière présidentielle, contribuant ainsi à installer dans l’opinion la thèse du «grand remplacement» chère à Renaud Camus et reprise à jet continu par le polémiste et ses amis. Pour plaire au patron, les têtes d’affiche de la chaîne se sont montrées prêtes à tout, caressant dans le sens du poil tous les «pas contents» du pays, et ils sont légion, surtout depuis le Covid qui a fait prospérer nombre d’antivax et adeptes des fake news. Et cela a marché.

L’exemple de Pascal Praud est le plus symptomatique. Voilà un homme qui ne faisait de mal à personne quand il était journaliste sportif, on aimait ou on n’aimait pas mais il faisait le job, qui s’est transformé en porte-voix des idées les plus populistes et racistes de la place, sans filtre, participant sciemment à un projet politico-médiatique de légitimation de l’extrême droite en France. Le problème, c’est que le succès de CNews crée un précédent. Pour engranger des parts de marché, il faudrait donc, non plus informer, enquêter, aller sur le terrain, mais alimenter la peur, la haine et la colère ? C’est une vieille recette, éprouvée par Fox News aux Etats-Unis. Une chaîne qui a clairement contribué à propulser Donald Trump au pouvoir en 2016 et continue à alimenter la ferveur partisane pour l’ex-président. C’est exactement le projet de CNews en France, installer l’extrême droite à l’Elysée, ce qui en fait une réelle menace pour la démocratie.