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Libération
L'édito d'Alexandra Schwartzbrod

Comment réparer la Syrie

Après des années de guerre civile et une dictature sanguinaire, la tâche du nouveau pouvoir à Damas pour maintenir la paix et reconstruire un Etat détruit est immense.
A Douma, dans la région de la Ghouta, victime d'une attaque chimique en 2018 par le régime de Bachar al-Assad, le 7 avril 2025. (Omar Sanadiki/AP)
publié le 28 avril 2025 à 20h48

Près de cinq mois après la chute de Bachar al-Assad, la Syrie tente toujours de surmonter quatorze ans de guerre civile et cinq décennies d’incurie et de corruption d’un régime dictatorial prêt à tout, jusqu’à massacrer son propre peuple, pour garder le pouvoir. Et ce n’est pas facile. Le nouvel homme fort du pays, le salafiste Ahmed al-Charaa, a d’abord dû montrer qu’il avait réellement rompu avec les groupes jihadistes dont il était issu. Changeant d’allure et même de nom. Pour être accepté des Occidentaux et obtenir ainsi la levée de leurs sanctions, il a dû se montrer un minimum «inclusif» dans la composition de son gouvernement, y incluant notamment une femme chrétienne, démocrate et féministe ainsi que divers représentants kurde ou alaouite. Cela suffira-t-il pour maintenir l’unité du pays ? Rien n’est sûr. Les proches du Président conservent les postes essentiels, et surtout la communauté alaouite, dont était issue la famille Assad, redoute de nouvelles envies de vengeance depuis le massacre dont elle a été l’objet en mars dans la région de Homs par des groupes d’hommes se réclamant des nouvelles autorités. Protégés pendant des décennies par la famille au pouvoir, les alaouites sont dangereusement exposés aux envies de représailles et il faudra du temps avant de voir retomber la haine suscitée par leur proximité passée avec Assad. Surtout si de nouvelles tueries viennent alimenter le cycle de la violence. Si elle veut donner à ce pays ruiné, pillé, détruit, divisé une chance de se relever et de se reconstruire, la communauté internationale a tout intérêt à aider les Syriens à se fabriquer un horizon et un but communs. De premiers pas ont été faits mais ils ne sont pas suffisants. Pris en étau entre les Israéliens, au sud, qui profitent de la situation pour grignoter du territoire, et les Turcs au nord qui entendent bien se voir récompenser pour l’aide apportée lors de sa prise de pouvoir, Ahmed al-Charaa n’a pas droit à l’erreur.