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Libération
L'édito de Dov Alfon

Crimes sexuels du 7 octobre 2023 en Israël : le rapport fondamental de l’ONU

Les enquêteurs onusiens ont l’immense mérite d’avoir mené une enquête très complexe, forcément incomplète vu la difficulté à réunir des preuves. Un travail indispensable, mais qui ne suffira sûrement pas à éradiquer certains négationnismes.
Sur les lieux du Festival Tribe of Nova, sur une route près de Gaza et au kibboutz Kfar Aza, le 10 octobre 2023. (Erik Marmor. Alexi J. Rosenfeld/AP)
publié le 5 mars 2024 à 21h40

Des dizaines d’entretiens, 5 000 photos, cinquante heures d’images vidéo atroces, et au final un rapport de 23 pages concluant que des violences sexuelles, «y compris sous la forme de viols et de viols en réunion», se sont «produites» en plusieurs endroits lors des attaques du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023. Le rapport des experts de l’Organisation des nations unies, au terme de deux semaines d’enquête sur place, est particulièrement difficile à lire quand il évoque la situation des otages israéliennes à Gaza, concluant que certaines d’entre elles «ont été soumises à diverses formes de violence sexuelle liée au conflit, y compris le viol et la torture à caractère sexuel», et qu’il y a «de bonnes raisons de croire que de telles violences sont encore en cours».

Pramila Patten, la représentante spéciale sur les violences sexuelles lors des conflits de l’ONU, aura mené à bien la première partie de sa mission dans des conditions particulièrement difficiles, entre le refus des autorités israéliennes de coopérer avec l’organisation, accusée de biais tenaces contre Israël, et la lenteur inhérente aux enquêtes de viols, certainement quand le nombre des attaquants se chiffre en milliers et quand les secouristes avaient pour priorités de chercher de possibles survivants et de rendre une sépulture digne aux centaines de cadavres mutilés et brûlés. Notre entretien avec la commissaire divisionnaire de la police israélienne et ancienne procureur Mirit Ben-Mayor décrypte la complexité de la tâche et éclaire la nécessité d’un processus judiciaire.

L’enquête de l’ONU ne pourra malheureusement pas éradiquer le négationnisme des crimes qu’elle a documentés, et ne pourra sortir du déni ceux du camp progressiste qui y trouvent refuge. Les viols n’ont pas eu lieu, diront certains, ou pas tous, ou en tout cas moins que dans l’autre camp ; d’autres acceptent les faits mais font preuve d’un mépris glaçant à l’égard des victimes israéliennes, comme si reconnaître leur statut rendrait la mort d’innombrables Palestiniens moins épouvantable. Il est toujours possible, même après ce rapport, de nier ce qui est maintenant une évidence ; mais cela n’effacera pas ce que les victimes ont enduré dans leurs derniers instants, et cela ne libérera pas la Palestine.