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Libération
L'édito d'Alexandra Schwartzbrod

Cyclone Chido : pour les Mahorais, il s’agit désormais de survivre

Cyclone Chidodossier
Après le passage du cyclone dévastateur, il ne faudrait pas que les autorités politiques passent comme souvent à autre chose et oublient de s’attaquer aux causes profondes de la misère.
A Mayotte, le 16 décembre 2024. (David Lemor/Libération)
publié le 16 décembre 2024 à 21h17

A Mayotte, les jours d’après sont presque pires. Il ne s’agit plus de se cacher, se calfeutrer ou résister à la violence des éléments, mais bien de survivre, affronter la cohue et les resquilleurs pour grappiller de quoi boire, manger, se soigner et idéalement se rebâtir un toit. Mayotte manquait déjà de tout avant d’être balayée par le cyclone tropical Chido, alors on imagine son état aujourd’hui. Le décompte des victimes s’annonce très difficile. L’archipel compte officiellement 320 000 habitants, mais il faut y rajouter 100 000 à 200 000 immigrants illégaux qui s’entassaient dans les bidonvilles sans être répertoriés nulle part. Ceux-là n’ont pas voulu rejoindre les abris ouverts par les autorités en prévision du cyclone, craignant qu’il s’agisse d’un piège pour les contrôler et les embarquer hors de l’île. Or aucun de ces «habitats précaires» n’a résisté à la violence du vent qui soufflait samedi à plus de 220 kilomètres par heure. On se souvient des roulements de tambour et d’épaules de l’ex-ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin quand il avait lancé en début d’année sa fameuse opération Wuambushu qui consistait à détruire des bidonvilles et à expulser les migrants en situation irrégulière. L’opération lui avait surtout servi à occuper le terrain médiatique et politique mais elle n’avait pas fondamentalement changé la situation catastrophique de l’archipel.

Alors faire un aller et retour à Mayotte comme s’y est plié ces deux derniers jours le ministre de l’Intérieur démissionnaire, Bruno Retailleau, et bientôt le chef de l’Etat, c’est bien, il fallait le faire ; décréter un deuil national comme l’a annoncé lundi soir Emmanuel Macron, c’est important. Mais il ne faudrait surtout pas que, une fois les secours acheminés et les plaies pansées, les autorités politiques passent comme souvent à autre chose et oublient de s’attaquer aux causes profondes de la misère. Enfin, les catastrophes comme celle qui vient de dévaster Mayotte seront de plus en plus fréquentes et violentes avec le dérèglement climatique. C’est aussi une ­nécessité absolue ­de s’attaquer à ce qui les engendre.