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Libération
L'édito de Paul Quinio

Débat au Salon de l’agriculture : Macron à nouveau piégé par son ego

En se lançant dans l’une de ses traditionnelles opérations de com, le chef de l’Etat n’a fait qu’ajouter à la colère des agriculteurs.
Emmanuel Macron à l'Elysée, le 16 janvier. (Albert Facelly/Libération)
publié le 23 février 2024 à 20h41

Il paraît que le Président est «très en colère». On le serait à moins. Alors que la grogne agricole est loin d’être sous contrôle, sa visite au Salon de l’agriculture s’annonçait ce samedi compliquée. Elle est désormais à hauts risques après le pataquès déclenché jeudi soir par l’annonce de la tenue d’un débat avec l’ensemble des acteurs du monde agricole dans les allées du parc des expositions de la porte de Versailles. Annonce faite par l’Elysée devant la presse, mais qui a fait sortir la FNSEA de ses gonds, le mouvement écolo les Soulèvements de la Terre, une de ses bêtes noires, faisant partie de la liste des invités. Mouvement qualifié, rappelons-le, d’écoterroriste par le gouvernement, jusqu’à être frappé de dissolution avant que le Conseil d’Etat ne le sauve in extremis. Le Château a bien tenté de rattraper le coup en assumant «une erreur». Mais le feu avait déjà embrasé la plaine, forçant l’exécutif à renoncer.

Si «erreur» il y a peut-être eu de la part d’un collaborateur ou d’un conseiller, Emmanuel Macron devrait en réalité être «en colère» contre lui-même. Car qui d’autre que lui a validé l’idée de ce débat, qui, avec ou sans les Soulèvements de la Terre, relevait de l’improvisation totale ? Qui d’autre que lui a pensé que cette opération de com, avec manches de chemise présidentielles relevées et regards d’acier droit dans les yeux des caméras de télévision, était une manière de calmer la colère agricole ? En fait, le chef de l’Etat a une fois de plus succombé à son péché mignon : son ego. Il a à de nombreuses reprises démontré son talent dans l’exercice de ce type de débat. Mais est-ce une raison pour penser que sa simple personne, sa simple présence deux heures durant, est la solution à tous les problèmes ? Peut-être Emmanuel Macron a-t-il été trompé par ce «bon sens» paysan revendiqué à l’Elysée qui prétend que «c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures confitures». Le vieux pot du grand débat risque là de se retourner contre lui. Le pire ? C’est que ce débat entre agriculteurs, associations écolos et tous les acteurs de la filière, est une nécessité. A condition qu’il soit organisé sérieusement, sincèrement, et d’y voir autre chose qu’une opération de com au service d’un homme.