Parti pour rester ? Ou, comme son prédécesseur, assuré d’être rapidement éjecté de son fauteuil de Premier ministre ? C’est, au bout du bout, la seule question à se poser à l’issue du discours de politique générale prononcé mardi 14 janvier à l’Assemblée nationale par François Bayrou. Car le Premier ministre l’a lui-même dit dans le premier tiers de son discours : «L’épée de Damoclès de la motion de censure paraît avoir installé la précarité au sommet de l’Etat.» Le problème est qu’en bon centriste, François Bayrou, sur moult sujets, ne s’est pas suffisamment avancé pour que l’on puisse apporter une réponse tranchée à la question. Il restait à l’issue de son intervention comme un sentiment de flotter au milieu, juste en dessous ou juste au-dessus de ce liseré des célèbres verres cantine Duralex, à moitié vides ou à moitié pleins.
En faisant le choix d’un discours qui voulait à tout prix éviter l’écueil du catalogue indigeste, le Premier ministre a d’abord navigué dans la partie à moitié pleine du verre. Même chose quand il a évoqué les questions de sécurité ou d’immigration sans user des effets de manche martiaux habituels dans ces registres. Cela fait du bien. Ou même quand il a expliqué l’urgence d’enrayer la spirale de l’endettement de la France ou la nécessité de refonder notre «logiciel démocratique». Mais, au fil des minutes, François Bayrou a commencé à ramer dans les eaux du verre à moitié vide. Car en évitant le piège du catalogue, il est tombé dans celui de l’imprécision, du vague, du flou, des évidences énoncées doctement. Pas facile dans ces conditions de pencher pour le CDD courte ou moyenne durée. D’autant que la réponse dépendait aussi des «bougés» que le Premier ministre devait faire sur la réforme des retraites. François Bayrou a proposé «un conclave» des partenaires sociaux pour l’examiner sans «tabou» ni «totem», mais aussi sans «suspension» et encore moins abrogation. Difficile de balayer d’un revers de main ce recours au dialogue social. Mais là, c’est l’épée de Damoclès d’un Medef peu enclin au compromis qui plane au-dessus d’une réforme de la réforme. Et donc au-dessus de la tête de François Bayrou.