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Libération
L'édito de Paul Quinio

Emmanuel Macron est un homme seul

Lâché par Gabriel Attal, invité à la démission par Edouard Philippe, bousculé par LR… Le Président, qui a donné jusqu’à ce mercredi 8 octobre à Sébastien Lecornu pour sauver la situation, n’a jamais été aussi isolé.

Emmanuel Macron au palais de l'Elysée le 16 septembre 2025. (Benoit Tessier/REUTERS)
ParPaul Quinio
Directeur délégué de la rédaction
Publié le 07/10/2025 à 20h47

«Je ne comprends plus les décisions du président de la République.» Gabriel Attal a prononcé cette phrase lundi soir 6 octobre lors d’un journal télévisé. Vingt-quatre heures plus tard, elle continue de nous frapper, avec dans la tête des warnings de voiture qui clignotent pour nous dire : «Mais a-t-on vraiment pris la mesure de la violence de cette déclaration ?» Gabriel Attal est un macroniste de la première heure. Un ancien Premier ministre d’Emmanuel Macron. Il est aujourd’hui patron de Renaissance, le parti du Président. Autrement dit un homme qui connaît bien le chef de l’Etat. Et là, il ne le comprend plus.

Il ne s’agit pas d’être dupe des arrière-pensées de Gabriel Attal. Sa prise de distance avec le chef de l’Etat date de cette dissolution qu’il a apprise en quasi direct. Et en politique, c’est vrai, les plus ambitieux trahissent le père comme les plus gourmands dévorent chaque matin les viennoiseries. Mais tout de même. Gabriel Attal ne comprend plus Emmanuel Macron. Que dit cette phrase ? Evidemment pas que le chef de l’Etat a perdu la tête. Ni que Gabriel Attal serait soudain devenu stupide. Elle dit qu’Emmanuel Macron est un homme seul. Il l’est plus que jamais. La phrase d’Edouard Philippe lui suggérant d’organiser une présidentielle anticipée l’atteste aussi.

Mais à la réflexion, cet isolement remonte chez Emmanuel Macron à ses débuts. Seul, il le fut lors de sa première campagne. Il est indéniable que ce fut une force. Son erreur aura été de penser qu’il pouvait le rester une fois entré à l’Elysée. Il a présidé seul. Il s’est soucié de son parti, donc de ses soutiens, comme de sa dernière chemise. Se retrousser les manches pour affronter lors d’un débat un public hostile, il aime. Seul face à l’adversité. Bien s’entourer, prêter attention au collectif, à quoi bon ? Ces critiques, le chef de l’Etat les entend depuis la crise des gilets jaunes. Souvenez-vous, ses promesses sur la fin de sa verticalité dans l’exercice du pouvoir. Sauf qu’il n’a en réalité rien entendu, rien changé. Si vous ajoutez à ces données macroniennes le fait que l’Elysée est un palais qui en a isolé d’autres, vous tombez sur l’Emmanuel Macron d’aujourd’hui. Celui qui marche sur les quais de Seine, mise en scène incroyable (inconsciente ?) d’une solitude dans laquelle il se complaît mais qui est devenue son piège.