Plus tard, beaucoup plus tard, quand les passions seront retombées (haine, amour, rejet…), un romancier ou une romancière se régalera du personnage de ce vieux président encore jeune – ou de ce jeune président déjà vieux –, seul en son château déserté, cherchant la protection des militaires et l’énergie de jeunes loups encore épargnés par l’usure du pouvoir. Les fins de mandats présidentiels ont souvent un côté crépusculaire – on se souvient de celui de François Mitterrand, d’autant plus terrible que la maladie le rongeait, forçant ce vieux fauve à s’en remettre aux «forces de l’esprit». Celle d’Emmanuel Macron a ceci de particulier qu’elle a commencé trois ans avant l’échéance de son bail par la faute d’une décision solitaire et suicidaire que la postérité se fera un malin plaisir de disséquer à l’envi. La dissolution a été un fracas pour le pays tout entier mais aussi pour celui qui en est à l’origine, soudain montré du doigt, raillé, détesté alors qu’il se pensait encore maître des horloges.
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Il ne doit son retour en demi-grâce qu’à l’élection de Donald Trump dont l’outrecuidance, la vulgarité et l’ignorance redonneraient de l’éclat à quiconque se tiendrait à ses côtés. Le chaos mondial orchestré par le milliardaire américain – avec la complicité directe ou indirecte d’une poignée d’autocrates ivres de leur pouvoir à l’image de Vladimir Poutine ou de Benyamin Nétanyahou – a soudain redonné de l’air et une utilité au président français. Pressé de dissiper ces brumes dans lesquelles il s’enfonçait, il s’est trouvé une nouvelle mission : combattre les guerres et donc s’y préparer, réarmer le pays, réarmer l’Europe. La guerre, les coups, c’est le langage qu’il connaît le mieux, on en a vu l’effet sur le pays, politiquement laminé, ou sur les relations avec l’Algérie, hystérisées. Ce n’est pas un hasard – et ce n’est guère rassurant – si son cri de ralliement préféré est «Feu !».