Décidément ce gouvernement s’acharne. L’exécutif veut un texte, avant «la fin de l’hiver», pour réformer les retraites. Elisabeth Borne annonce une «consultation» dès cette semaine. Et Emmanuel Macron continue bille en tête avec son report de l’âge de départ à 65 ans, même s’il sait pertinemment qu’il s’agit d’un casus belli pour les syndicats. Pourtant, malgré un premier mandat, il est loin d’avoir réglé un paradoxe majeur : il souhaite l’allongement de la durée de la carrière mais il a oublié de s’assurer que les Françaises et les Français peuvent encore en avoir une après 50 ans…
Décryptage
La proportion de seniors en activité en France est en deçà de la moyenne des pays de l’OCDE. Les grands exclus : les individus entre 60 et 64 ans. A cet âge-là, ils ne sont plus que 35,5% à encore exercer un métier. Les autres ont sans doute pris un «plan», obtenu une rupture conventionnelle ou sont au chômage en attendant de réclamer le versement de leur pension. Car les gouvernements se cassent successivement les dents sur la tradition française des «départs précoces», des «préretraites» et autres arrangements des entreprises pour se débarrasser de celles et ceux qui sont en fin de carrière. Les entreprises n’ont pas trouvé mieux pour «alléger la masse salariale». Et leurs difficultés actuelles à recruter ne semblent pas les pousser à changer de credo.
Vous ne vous sentez pas concerné ? Vous êtes pourtant considéré, dès 50 ans, comme senior et officiellement au sommet de la pyramide des âges. Et si vous faites partie des «jeunes» qui lancent encore régulièrement des «de toute façon, on n’aura pas de retraite», sachez qu’il faut entre cinq et quinze années d’expérience pour être considéré comme senior dans votre domaine et vous voir donc bientôt touché, vous aussi, par les problématiques que nous soulevons : votre expérience fait de vous une main-d’œuvre coûteuse, dure à diriger et moins productive, selon les préjugés en vigueur. Si rien ne change, les discriminations à l’embauche finiront par vous rattraper. Il serait donc temps d’en finir collectivement avec le gâchis des travailleurs les plus expérimentés et le déni de vieillesse dans un monde du travail qui n’a jamais été aussi peu attractif. Et la réforme qui se profile n’augure rien de bon.