Dites 49.3 et la censure tombera… Ce lundi, le Premier ministre Michel Barnier va dégainer le désormais très fameux article de la Constitution qui permet de faire adopter sans vote un texte, en l’occurrence le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). La gauche déposera illico une motion de censure. Le RN, encouragé par une base «dégagiste», laisse entendre qu’il la votera. Ce qui ferait une majorité pour faire chuter le gouvernement de Michel Barnier. Mais il reste un peu de suspense : la leader d’extrême droite Marine Le Pen continuait ce week-end à pousser son avantage pour obtenir d’ultimes concessions du Premier ministre. Elle nous a aussi habitués à des virages tactiques de dernière minute à 180 degrés. Dites 49.3 et la censure, peut-être, ne tombera pas. Wait and see donc.
Il n’y a en revanche pas besoin d’attendre ce verdict pour s’alarmer de l’affaiblissement politique généralisé, qui ne peut que préparer le terrain au pire, c’est-à-dire à l’extrême droite. Emmanuel Macron ? Il est inutile de revenir sur sa décision inique de dissoudre, ou sur son refus de voir le résultat des législatives comme une victoire du front républicain. Michel Barnier ? En acceptant le poste de Premier ministre, il a lui aussi tourné le dos au message envoyé par une majorité de Français lors des législatives. Une fois nommé, il s’est montré très compréhensif à l’égard de l’extrême droite, au point d’en devenir le pantin, en tout cas une victime de son chantage. Il n’a, c’est vrai, pas été aidé par les formations dites de gouvernement qui composent son socle commun. Des ténors des différentes chapelles macronistes aux têtes d’affiche LR, tous ont privilégié leurs intérêts de boutiques, avec la présidentielle de 2027 en tête. La gauche ? Elle s’est laissée piéger par Jean-Luc Mélenchon et sa lecture volontairement erronée du résultat des législatives, symbolisée par son «notre programme, rien que notre programme».
Pas facile à partir de là d’imaginer des compromis, mais c’était, malheureusement, le but recherché. Le RN ? Rien à en attendre pour redorer le blason de la politique. Mais le constat est imparable : il a profité de cette médiocrité généralisée. Il a plus que jamais le pouvoir de dire stop ou encore au gouvernement Barnier. Aujourd’hui ? Demain ? Après-demain ? Qu’importe. Le vrai sujet d’inquiétude réside dans cette phrase entendue un jour dans la bouche d’une jeune fille de 19 ans : «Les gens de toute façon n’attendent plus rien de la politique.»