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Libération
L'édito d'Alexandra Schwartzbrod

Héritage des plus riches : l’autre injustice fiscale

Parce qu’il intervient à une période difficile, l’impôt sur les successions inquiète de nombreux Français. Il faut pourtant s’en saisir pour empêcher les grandes fortunes de passer entre les mailles du filet.

C’est une macroniste, et non des moindres, Yaël Braun-Pivet, qui a remis le dossier sur la table. (Gonzalo Fuentes/Reuters)
Publié le 28/10/2025 à 21h10

C’est sans doute l’impôt le plus détesté des Français. De tous les Français, même des moins fortunés. Car l’impôt sur les successions touche à quelque chose de l’ordre de la mémoire familiale, donc de l’intime, il menace surtout d’amputer un trésor – même minime – représentant le travail d’une vie, patiemment mis de côté, voire fructifié, pour être transmis aux générations suivantes. Sa simple évocation fait donc dresser les cheveux sur la tête du milliardaire comme du commerçant ou du petit chef d’entreprise. Pourtant le premier, en utilisant savamment les divers abattements et exonérations mis à sa disposition, paiera bien moins de droits de succession qu’un représentant de la classe moyenne. Voilà pourquoi le sujet de l’héritage revient sur la table.

Alors que les caisses de l’Etat sont vides et que la demande de justice fiscale ne fait que croître, augmenter les recettes dans la balance du budget tout en rétablissant une forme d’équité devant l’impôt apparaît comme la solution idéale. Sauf que droite et extrême droite sont vent debout contre ce qu’elles qualifient d’«impôt sur la mort», et la gauche marche sur des œufs, consciente que son électorat la suivra sans doute beaucoup moins que sur la taxe Zucman qui vise en gros le même objectif : pousser les plus riches à participer davantage à l’effort collectif. C’est bizarrement une macroniste, et non des moindres, Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, qui a remis le dossier sur la table, préconisant de ponctionner la transmission des baby-boomers qui devrait représenter quelque 9 000 milliards d’euros d’ici à 2040, selon la Fondation Jean-Jaurès. Emmanuel Macron y est farouchement hostile et pourtant cela relève du bon sens. Il ne s’agit pas d’empêcher le petit héritier de récupérer le pactole familial mais de lutter le plus possible contre les inégalités de naissances en empêchant les très grandes fortunes de passer une fois de plus à travers les mailles du filet.