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Libération
L'édito de Hamdam Mostafavi

L’IA, une amie qui vous veut du bien ?

Coach, psy, confident… De plus en plus de Français livrent leur vie intime aux intelligences artificielles conversationnelles. Difficile de ne pas s’en inquiéter.
Difficile de penser qu’une génération biberonnée aux conversations intimes avec l’IA pourrait, à long terme, favoriser les «vraies» interactions sociales. (Marie Docher / Montage Libération/plainpicture)
publié le 29 mai 2025 à 20h49

«J’ai parfois des conversations plus intéressantes avec l’IA qu’avec mes propres amis», raconte Florian, usager régulier d’un chatbot d’IA conversationnelle, à Libération. Pleurer un amour perdu, raconter ses galères de boulot, confier ses angoisses existentielles, philosopher sur l’actualité du monde… De plus en plus d’entre nous se tournent vers des IA conversationnelles comme vers un ami idéal à qui on pourrait tout raconter, sans craindre de l’ennuyer ni d’être jugé. Un psy gratuit aussi, mais sans les compétences associées. Il y a presque trois ans, l’arrivée de ChatGPT avait démocratisé le rapport à l’intelligence artificielle. Certains l’utilisent comme un outil pour accélérer le travail, mais les humains étant des êtres d’émotions, la pente vers l’ersatz affectif n’a pas tardé, pour venir suppléer l’interaction sociale ou combler un sentiment de solitude qui frappe la société comme une épidémie incontrôlable.

Faut-il nécessairement condamner ce recours intime à l’IA ? Difficile de penser qu’une génération biberonnée aux conversations intimes avec l’IA pourrait, à long terme, favoriser les «vraies» interactions sociales. D’autant que le rapport à ce chatbot modelé à notre image ne fait qu’accentuer un certain narcissisme. Plutôt que de faire face au réel et à l’altérité, on se console de plus en plus avec la virtualité, sans penser à ce qui est peut-être fait de l’étalage de nos données personnelles. Après le lancement de son chatbot en mars, Meta, la maison mère de Facebook, Instagram et WhatsApp, a annoncé que les informations publiques de ses utilisateurs seraient analysées pour exercer son intelligence artificielle. A l’époque du lancement de ChatGPT, Sam Altman, PDG d’OpenAI, affirmait lui-même ses «réserves profondes sur cette vision où chacun sera très proche d’IA amicales». Le futur est déjà là, et on peut s’inquiéter de ce vers quoi il nous mène.