Annie est bénévole aux Restos du cœur, dans la Drôme, depuis qu’elle est en retraite. Et «tous ces gens qui restent sur le carreau», ça la perturbe. Sandrine, elle, bosse pour l’association fondée par Coluche dans l’Ain et a parfois mal au ventre à l’idée de devoir réduire le volume d’un panier accordé à un bénéficiaire, pour qu’il y en ait pour tout le monde. Car Annie comme Sandrine le confirment : l’affluence aux Restos est montée en flèche cette année, dopée par l’inflation des produits alimentaires, très forte, et qui baisse moins vite que l’inflation en général.
Annie et Sandrine sont généreuses. Mais nous ne sommes pas allés les voir pour convoquer je ne sais quel esprit de Noël, et rappeler à quelques jours des fêtes que la générosité, malgré un tassement en 2023 dû au contexte économique et social, reste une qualité française. Nous sommes allés les voir pour rappeler qu’elles font, comme des milliers d’autres bénévoles dans des centaines d’associations caritatives, un boulot formidable. Et que si elles prennent de plus en plus souvent comme des uppercuts cette «inflation» de situations personnelles très difficiles, elles continuent de faire le job.
Reportage
Ce qui n’est pas le cas de tout le monde. A leur dignité et conscience quasi «professionnelle», les acteurs des secteurs de l’agroalimentaire, fournisseurs et distributeurs, opposent un cynisme consternant. Pour simplifier, ils se renvoient la patate chaude des marges, sur le thème «ce n’est pas nous mais eux». Résultat : ils baladent tout le monde depuis des mois, gouvernement compris. L’exécutif s’est, lui, montré incapable de taper du poing sur la table. Il a fait le job pour amortir l’inflation sur l’énergie. Pas là. D’aucuns argumenteront que sortir le chéquier en permanence n’est pas une solution. Peut-être. Mais dans ce cas, il fallait faire preuve d’une volonté politique pour tordre le bras aux acteurs de l’agroalimentaire et de la grande distribution. Cela n’a pas été le cas.