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Libération
L'édito de Dov Alfon

Interview de Joann Sfar et Lee Yaron : le besoin de comprendre et d’espérer

Le dessinateur et la journaliste du «Haaretz», qui publient chacun un ouvrage sur le 7 Octobre, expliquent le choc immense que représente cette attaque terroriste en Israël et espèrent un retour à la paix. Des livres qui, comme d’autres, répondent à la soif d’information des lecteurs français.
Le dessinateur Joann Sfar et la journaliste Lee Yaron, le 25 avril 2024, à Paris. (Cyril ZANNETTACCI/Cyril Zannettacci / VU')
publié le 14 mai 2024 à 21h23

Le 7 Octobre est une journée qui, pour beaucoup, n’a pas encore pris fin, un cauchemar permanent dont ils ne peuvent se réveiller. Chaque jour qui passe apporte de nouvelles informations qui rendent la compréhension de l’événement et de ses conséquences quasiment impossibles. S’il n’y a pas de comparaison historique valable, force est de rappeler que le 23 août 1929, le massacre de Hébron, commis par des insurgés palestiniens, se soldait par la mort de 70 civils juifs, tandis que le 9 avril 1948, environ 120 civils palestiniens étaient assassinés à Dir Yassin par les troupes paramilitaires juives. Or, ces deux dates continuent d’alimenter jusqu’à aujourd’hui les récits contradictoires de l’histoire, définissant pour les Israéliens et les Palestiniens une double année zéro de ce conflit bientôt centenaire.

On imagine donc le sentiment de rupture qu’impose aux Israéliens le bilan des carnages perpétrés le 7 Octobre par le Hamas. Les représailles féroces menées par Israël sur Gaza, dont le bilan s’élève au moins à 30 000 morts, ont rapidement effacé pour l’opinion publique mondiale les heures de torture, de viols et de meurtres qui les ont précédées.

Cette confusion a réveillé chez les Français un besoin de se tourner vers les livres, ultimes compagnons de la complexité humaine. Phénomène d’édition ou révélateur sociologique, plus de 50 livres sur le 7 Octobre sont sortis ou vont bientôt paraître et la liste des meilleures ventes d’essais reflète depuis de longues semaines cette soif de plonger dans une compréhension profonde de cette journée d’horreur et de son bilan. Nous avons réuni autour de la même table deux auteurs qui voient leurs livres portés par cette vague : Lee Yaron, journaliste de Haaretz qui a réussi à travers la somme de témoignages recueillis auprès des survivants à redonner vie aux victimes ; et Joann Sfar qui, dans son roman graphique, réunit des réactions explosives formant un ressenti à la fois unique et largement partagé. On ne trouvera sans doute pas dans ce dialogue, hésitant et téméraire comme un pas de deux sur une scène glissante, toutes les réponses nécessaires ; mais on y trouvera mieux, des questions qui résonnent comme un espoir de renouveau.