Pendant que les leaders de gauche s’écharpent pour trouver une ou un Premier ministre acceptable par tous, que le camp présidentiel se délite sous la pression des ambitions individuelles et que la droite tente de panser les plaies de la division et de la trahison, l’extrême droite compte les points en se frottant les mains. Certes, le Rassemblement national n’a pas obtenu la majorité absolue comme il l’escomptait, ni même la majorité relative : la victoire que les instituts de sondage lui prédisaient depuis des mois a fait pschitt et il suffisait de voir et d’entendre Jordan Bardella au lendemain d’une «défaite» dont il a dit «assumer sa part de responsabilité» pour comprendre à quel point le coup a été violent pour le protégé de Marine Le Pen.
Mais, pour l’extrême droite, est-ce vraiment une défaite ? La cacophonie et les dissensions sont telles dans les autres formations que Marine Le Pen, réélue présidente du groupe parlementaire du RN – un groupe en très nette croissance par rapport à la dernière législature –, n’a plus besoin de se montrer sur tous les plateaux télé. Elle attend tranquillement son heure. Consciente que, si rien n’est proposé aux Français qui se sentent oubliés voire abandonnés, si le spectacle des déchirements internes aux autres formations est trop pitoyable, si le pays devient à ce point ingouvernable, alors elle tiendra sa chance en 2027… ou avant.
Les Français auront – peut-être – oublié les candidats racistes, homophobes, antisémites ou complotistes investis par le RN en 2024 ou zappé le projet avancé par certains leaders du parti d’interdire aux binationaux certains postes stratégiques de l’administration. Il est donc là, le principal défi de la gauche : montrer à celles et ceux qui ont fait barrage à l’extrême droite en 2024 qu’ils ont eu raison de se mobiliser ; répondre aux attentes de toutes celles et de tous ceux qui, en votant RN, ont simplement voulu tirer la sonnette d’alarme et réclamer plus d’attention ; placer le destin collectif au-dessus des batailles d’ego.