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Libération
Edito

La mixité scolaire, antidote à la fracture sociale ?

Les chiffres sont affolants : les collèges ghettos comptent 60 % d’enfants d’ouvriers, de parents au chômage ou inactifs, alors qu’ils ne représentent que 37 % des élèves au niveau national.
Rentrée au collège public Jean-Perrin, à Paris, en septembre 2021. Le dernier ministre de l’Education qui a tenté de combattre l'apartheid scolaire était Najat Vallaud-Belkacem. (Cyril Zannettacci/Vu pour Libération)
publié le 2 novembre 2021 à 20h53

La ségrégation sociale en France n’est nulle part plus visible qu’à l’entrée d’un enfant en sixième. La mixité du primaire disparaît soudainement, laissant les enfants défavorisés dans des «collèges ghettos» tandis que les parents des autres se sont débrouillés pendant l’été pour déménager, ou redécouvrir la foi, ou s’inventer une adresse fictive pour contourner une mixité sociale dont leurs enfants feraient les frais. Les chiffres sont affolants : les collèges ghettos comptent 60 % d’enfants d’ouvriers, de parents au chômage ou inactifs, alors qu’ils ne représentent que 37 % des élèves au niveau national.

Cela n’a pas l’air de troubler outre mesure le ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, qui, il est vrai, a eu la chance d’étudier dans un collège renommé pourtant bien loin du domicile familial. Le dernier ministre de l’Education qui a tenté de combattre cet apartheid social était Najat Vallaud-Belkacem, et plusieurs des projets qu’elle a soutenus peuvent maintenant prouver leurs bienfaits. Exemple, ce reportage que nous publions sur l’une des fractures sociales les plus criantes de l’Hexagone : les collèges de Toulouse. La ville exhibe une réussite économique éclatante mais, dans ses quartiers sensibles, regroupés sous le nom de Mirail, le taux de pauvreté franchit la barre des 50%, alors qu’il reste cantonné à 10% dans la plupart des autres quartiers toulousains. C’est là que deux collèges ghettos ont été fermés et un millier d’élèves répartis dans onze établissements de centre-ville ou de zone pavillonnaire. Les premiers sont maintenant entrés en seconde. Ils sont 200 à Pierre-de-Fermat, le lycée prestigieux de Toulouse. Oui, cela a coûté beaucoup d’efforts et pas mal d’argent. Moins cependant que l’assistanat national aux collèges privés dits «sous contrat» dont a bénéficié le jeune Blanquer, et certainement moins que coûterait l’éventuelle réparation de cette fracture sociale qui s’élargit d’année en année partout en France.