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Libération
L'édito de Paul Quinio

Le débat sur le budget 2026, un crash texte pour la culture du compromis

Derrière la complexité du vote du projet de budget 2026, les discussions qui démarrent vendredi 24 octobre à l’Assemblée nationale seront aussi l’occasion de vérifier la sincérité de Sébastien Lecornu à ne pas recourir au 49.3 et la capacité des parlementaires à trouver des accords.

Le Premier ministre, Sébastien Lecornu, ce jeudi 23 octobre 2025 à Romainville en Seine-Saint-Denis. (Thibaud Moritz/AFP)
ParPaul Quinio
Directeur délégué de la rédaction
Publié le 23/10/2025 à 21h03

La semaine de la mort. Et la Toussaint n’y est pour rien. Vendredi 24 octobre, s’ouvre à l’Assemblée nationale le débat sur le budget 2026, et c’est peu dire qu’il s’annonce à hauts risques. Pour ceux qui en doutaient, les travaux en commission des finances ont donné un aperçu de l’enjeu : le projet de budget présenté par le gouvernement a été retoqué. Les voies empruntées par les parlementaires étant parfois impénétrables, les débats dans l’hémicycle repartiront du texte initial. Retour à la case départ donc. La tradition parlementaire veut que les débats soient en commission souvent plus «civilisés» qu’en séances. C’est dire ce qui nous attend. Recettes supplémentaires qu’il faut aller chercher, réduction des dépenses qu’il faut aller trouver, la foire d’empoigne est assurée si chacun campe sur ses positions… alors que personne, au centre, à gauche, à droite, n’est assez fort pour se dresser sur ses ergots et imposer ses vues sur la fiscalité des plus riches, les niches fiscales des retraités ou la modification du barème de l’impôt sur le revenu, pour ne citer que quelques exemples des multiples questions budgétaires sur lesquelles vont s’écharper les députés.

Mais au fond, si c’est bien d’un texte budgétaire, dans toute sa complexité, dont on parle, l’essentiel dans ce qui va se jouer dans les jours qui viennent n’est-il pas ailleurs ? Et finalement dans deux questions assez simples ?

La première est celle de la sincérité politique. En l’occurrence celle de Sébastien Lecornu quand il a prononcé devant la représentation nationale le mot «suspension» à propos de la réforme des retraites. Malheureusement, Emmanuel Macron a semé cette semaine le doute en évoquant un simple report. Le Conseil des ministres spécialement convoqué ce jeudi 23 octobre sur le sujet n’a pas rassuré non plus. La discussion parlementaire dira assez vite le degré de sincérité du Premier ministre (et donc d’Emmanuel Macron) dans leur volonté de sortir de la crise politique. Croisons les doigts… car si l’insincérité prédomine du côté de l’exécutif, la deuxième question devient caduque. Et la crise politique s’aggravera.

Si en revanche sincérité il y a, la deuxième question est la suivante : quelle est la capacité des uns et des autres dans l’hémicycle, au centre, à gauche, à droite, à faire des compromis, puisque 49.3 il n’y aura pas ? De ce point de vue, le résultat de la commission des finances n’est pas rassurant. Les parlementaires ont pourtant une chance quasi historique de s’emparer d’un pouvoir qu’ils réclament à cor et à cri depuis des années. Tous bords confondus, en dehors des extrêmes qui ne goûtent par nature guère au compromis, sauront-ils la saisir ?