Depuis le temps que l’on tire la sonnette d’alarme, que l’on voit s’afficher l’urgentiste Patrick Pelloux dans la lucarne brocardant les autorités pour leur manque d’anticipation, on pourrait croire qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil : les urgences craquent mais, au bout du compte, il y aura toujours quelqu’un pour nous accueillir dans un hôpital en cas de gros pépin. Et bien détrompez-vous : bientôt vous pourrez trouver porte close, même si vous pissez le sang. Au mieux, vous tomberez sur un secouriste ou une infirmière qui fera le tri entre celles et ceux qui patientent à vos côtés, avec plus ou moins de stress et d’angoisse, avant de décider laquelle ou lequel a le plus besoin d’être traité en urgence.
Vous voyez le topo ? Eh bien ce scénario catastrophe, digne d’un roman de politique-fiction, est en train de s’écrire sous nos yeux dans nombre d’hôpitaux publics de France. Ces établissements sont à l’os. Rincés par les deux années de Covid qui ont surchargé les services, bon nombre de soignants ont déclaré forfait. Beaucoup ont décidé de partir dans le privé, où ils sont mieux traités, ou choisi de changer de métier. Ceux qui restent sont au bord du burn-out, en nombre insuffisant pour absorber l’afflux des malades. Les pouvoirs publics sont évidemment en cause, qui n’ont pas anticipé cette tragédie, tardant à réorganiser la chaîne des soins, à allouer davantage de crédits et à susciter des vocations chez les médecins et infirmières. Mais le manque de solidarité est aussi à pointer du doigt. Il existe désormais un deux poids, deux mesures flagrant entre hôpital public et médecine libérale qui met à mal le collectif. Comment réhabiliter le service public et le rendre à nouveau attractif ? Le sujet dépasse de loin les simples attributions du ou de la ministre de la Santé. C’est un vrai problème de société qui devrait être le sujet de préoccupation de l’ensemble du futur gouvernement. D’autant que l’hôpital public n’est pas le seul concerné par cette désaffection, l’Education nationale vivant les mêmes affres.