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Libération
L'édito de Paul Quinio

Loi immigration : le rejet du texte à l’Assemblée, un revers à double tranchant

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Si l’adoption de la motion de rejet, ce lundi 11 décembre, est un obstacle de taille dans le parcours parlementaire du texte porté par Gérald Darmanin, ce dernier pourrait abandonner la partie «good cop» de son projet de loi afin de rallier les voix de la droite et de l’extrême droite, et ainsi parvenir à ses fins.
Gérald Darmanin à l'Assemblée nationale, à Paris le 11 décembre 2023. (Albert Facelly/Libération)
publié le 11 décembre 2023 à 20h12

Commençons par les bonnes nouvelles. L’adoption, ce lundi 11 décembre, par les députés de la motion de rejet présentée par les écologistes est un gros caillou dans le parcours parlementaire, déjà compliqué, du projet de loi sur l’immigration. Certes, le projet n’est pas abandonné. Mais ce revers pour la majorité que d’aucuns qualifieront de pure forme a été possible car, sur le fond, la pertinence politique d’une énième loi sur l’immigration n’a jamais été démontrée. Deuxième bonne nouvelle : Gérald Darmanin va devoir en rabattre un peu. Celui qui se voyait calife à la place d’Elisabeth Borne vient de démontrer qu’il lui manquait encore une corde majeure à son arc d’ambitieux parmi les ambitieux : celle de négociateur habile. Ce texte devait pour lui être un marqueur, une case à cocher dans son ascension. C’est en réalité son chemin de croix. Et c’est justifié : l’immigration est un sujet sensible qui mérite mieux que cette petite politique à laquelle il se livre depuis des mois. Cette fronde parlementaire est enfin un revers pour Emmanuel Macron, une preuve supplémentaire que son deuxième quinquennat risque de chercher jusqu’au bout un début de souffle. Si son «en même temps» l’a porté entre 2017 et 2022, le charme est bel et bien rompu. Depuis sa réélection, sa majorité relative l’empêchait. L’adoption d’une motion de rejet ne peut être interprétée que comme un pas de plus vers un affaiblissement fatal.

Il y a néanmoins deux mauvaises nouvelles dans cette affaire. La première est qu’au lieu de renoncer à un texte vérolé depuis le début, le ministre de l’Intérieur, pour arriver à ses fins, pourrait laisser tomber la partie «good cop» de son texte sur la régularisation des travailleurs sans papiers des filières en tension. En clair, il devrait durcir son texte pour rallier la droite et l’extrême droite. Deuxième mauvaise nouvelle qu’il ne sert à rien de mettre sous le tapis : cet épisode parlementaire, qui voit gauche, droite et extrême droite voter de concert, est un cran de plus dans la normalisation de l’extrême droite.