Parcourir de redoutables zones grises et trouver un chemin de crête sans que le compromis ne mène à la compromission. Dans un court essai qui amène à penser contre soi, Négocier avec le diable. La médiation dans les conflits armés (éditions Textuel), Pierre Hazan revisite les trente dernières années sur le théâtre des crimes de masse de la Bosnie au Sahel, de l’Ukraine à l’Afghanistan. Ancien journaliste devenu conseiller auprès du Centre pour le dialogue humanitaire, l’auteur défend une «éthique de la responsabilité pour affronter la réalité de la vie internationale, faite de compromis insatisfaisants et de pragmatisme», et délaisse une éthique de la conviction qui consiste à n’être que du côté du bien, notamment pour dénoncer les crimes de guerre. Autrement dit, il faudrait parler au diable, à l’agresseur, au criminel de guerre pour soulager les populations civiles en s’efforçant de ne pas franchir une «limite floue, mais bien réelle, comme le rappelait l’ex-président de Médecins sans frontières (MSF) Rony Brauman, au-delà de laquelle l’aide aux victimes se transforme insensiblement en soutien aux bourreaux».
Jusqu’où la neutralité a-t-elle sa place entre les agresseurs et les agressés ? Faut-il en permanence marcher sur une ligne de crête très délicate entre compromis et compromission ?
Exactement. L’éthique de responsabilité du médiateur est essentielle. Il faut aller le plus loin possible, parler avec des agresseurs y compris quand ça tu