Elles ont fait parler d’elles tout au long de l’été, envahissant la Méditerranée ou l’océan et allant cette semaine jusqu’à obstruer les tambours filtrants des stations de pompage de la centrale nucléaire de Gravelines, dans le nord de la France. Les méduses sont-elles de plus en plus nombreuses ou deviennent-elles l’obsession de touristes avides de bains de mer ? Peut-être symbolisent-elles tout simplement l’état de nos corps et de nos cerveaux gélifiés par le bouillonnement brûlant et angoissant de la planète.
Ce qui est sûr c’est que si la méduse n’est pas la meilleure amie de l’homme, celui-ci fait tout pour favoriser son développement. En encourageant la surpêche de ses prédateurs d’abord (thons, espadons, tortues marines), et surtout en déversant ses déchets plastiques dans les océans. La plupart des méduses ont en effet besoin de supports pour naître et se développer, comme l’explique notre enquête, et le plastique est le vecteur idéal : transporté par les courants il dissémine les méduses dans toutes les mers du globe. Quand on sait que près de 10 millions de tonnes de plastique sont jetées chaque année à l’eau, on comprend l’ampleur du phénomène.
Et donc l’importance des négociations internationales entamées il y a une semaine à Genève pour conclure un traité sur la pollution plastique. Celles-ci doivent prendre fin jeudi 14 août et les informations qui filtrent de Suisse n’incitent guère à l’optimisme. L’Union européenne serait «prête à des compromis» pour trouver un accord mais «pas à n’importe quel prix». Nous ne sommes donc pas près de nous débarrasser des méduses, d’autant qu’elles ne semblent gênées ni par la pollution, ni par l’acidification de l’eau générée par l’excès de CO2.
Nous pouvons toujours nous entraîner à préparer ces salades de jellyfish que certains affectionnent, nous serons sans doute bien contents, un jour, de pouvoir compter sur cette matière première quasi infinie. Après tout, aucune pitié, la méduse n’a ni cœur ni cerveau. Elle incarne peut-être, au fond, l’être que nous redoutons tous de devenir.