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Libération
L'édito d'Alexandra Schwartzbrod

Pour Emmanuel Macron, le chaos vaut mieux que la gauche

En balayant l’hypothèse du NFP à Matignon, le chef de l’Etat a prouvé que tout vaut mieux à ses yeux qu’un gouvernement qui détricoterait sa réforme des retraites et menacerait les plus riches.
Emmanuel Macron à l'Elysée. (Sarah Meyssonnier/REUTERS)
publié le 27 août 2024 à 21h05

Le quotidien britannique de référence The Guardian n’a pas pris de détours, lundi soir, pour résumer la situation politique en France : «Le chaos». Et il sait de quoi il parle, lui qui vient de couvrir une crise politique à rallonge au 10, Downing Street. De fait, en annonçant par un simple communiqué qu’il était hors de question de constituer un gouvernement issu du Nouveau Front populaire, alors même que celui-ci est arrivé en tête aux législatives, Emmanuel Macron a prouvé que les soi-disant «consultations» engagées de façon bonhomme depuis vendredi n’étaient qu’un leurre, et achevé de ruiner son capital confiance. Il a déchaîné la colère de toutes celles et tous ceux qui, dans leur grande majorité, ont indiqué par leur vote le 9 juin qu’ils voulaient une autre politique, et ouvert une période d’incertitudes majeures, alors que les Jeux paralympiques s’ouvrent ce mercredi sous les yeux du monde entier, et que la rentrée scolaire se prépare dans une ambiance de plomb avec une ministre démissionnaire.

Pour que le chef de l’Etat en soit réduit à envisager de consulter Nicolas Sarkozy et à déjeuner avec François Bayrou, c’est qu’il ne sait plus comment s’extraire du piège dans lequel il s’est lui-même enfermé. Mais tout vaut mieux, à ses yeux, qu’une gauche au pouvoir qui détricoterait sa réforme des retraites passée au forceps et menacerait les plus riches qu’il ne cesse de favoriser depuis son arrivée au pouvoir. «A travers lui, c’est toute une classe qui réagit», déclare dans Libération le député ex-LFI de la Somme François Ruffin. Des propos qui résonnent étrangement avec la réaction, mardi, du patron du Medef, Patrick Martin, se disant ouvertement «rassuré» par l’éviction du NFP.

Cette incertitude et cette inquiétude vont bien au-delà du court terme. Vu l’ampleur de la crise politique ouverte par le chef de l’Etat, il est fort probable que les Français devront retourner aux urnes à brève échéance. Et vu le peu de cas qui est fait de leur vote, on peut craindre que les électeurs de gauche, cette fois, ne se déplaceront pas, au risque de laisser l’extrême droite emporter la mise.