Michel Barnier, ou l’homme qui voulait 60 milliards. C’est en tout cas le montant de l’effort budgétaire que les équipes du Premier ministre ont mis sur la table au lendemain de sa déclaration de politique générale. Le chiffre a évidemment fait son petit effet. C’était le but recherché. Une manière pour Michel Barnier de dire aux Français, mais aussi à ses adversaires politiques déclarés comme à ses faux amis, et ils sont nombreux, qu’il n’était pas entré à Matignon pour ajouter une ligne à son CV déjà très long mais bien, vu l’ampleur des dégâts, dans l’intérêt du pays. Quitte à accepter cet enfer qu’est Matignon, autant y aller à fond.
En mettant la barre aussi haut, Michel Barnier, tactiquement, coince les Attal et Darmanin qui brandissent depuis leur sortie du gouvernement la moindre hausse d’impôts comme une raison possible de rupture. Car hausse d’impôts il y a aura, à hauteur de 20 milliards, soit un tiers de l’effort. Et c’est, de fait, une rupture avec la matrice fiscale d’Emmanuel Macron. En taxant, même temporairement, les grandes entreprises et les contribuables très aisés, Michel Barnier coince aussi la gauche, qui réclame depuis des mois et des mois davantage de «justice fiscale». Il la coince un peu, mais pas complètement non plus, car Matignon pousse le bouchon un peu trop loin en essayant de faire croire que la classe moyenne sera épargnée par les efforts à faire. Elle sera touchée par les 40 milliards d’économie que le gouvernement veut ventiler entre l’Etat, la Sécurité sociale et les collectivités territoriales. Suppressions d’aides par ici, report de l’indexation des pensions de retraite sur l’inflation par là, tous les Français ou presque seront directement concernés. Et indirectement, avec les coupes qui ne manqueront pas d’affecter le fonctionnement de certains services publics. Michel Barnier assure y être très très attaché. Mais comme nombre de ses prédécesseurs, il s’accroche à cette idée de faire mieux avec moins. Si l’on prend l’école et la santé, pas sûr qu’il ait le temps de nous dire comment.