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Libération
L'édito d'Alexandra Schwartzbrod

Procès : il faut un avant et un après Mazan

Procès des viols de Mazandossier
Riches d’enseignements, les débats à la cour criminelle d’Avignon sont effrayants tant les accusés sont intégrés dans la société. Espérons que le procès permette une meilleure lutte contre les violences sexuelles.
A la cour criminelle du Vaucluse, lors du procès des viols de Mazan, jeudi. (Patrick Gherdoussi/Libération)
publié le 3 octobre 2024 à 20h36

Bien sûr, ce serait plus simple si l’on pouvait qualifier de monstres les 50 coaccusés du procès des viols de Mazan. Si ces hommes n’étaient pas faits comme les autres. S’ils étaient nés violeurs. S’ils vivaient en marge de la société. Ou s’ils venaient d’ailleurs, validant les fantasmes de l’extrême droite et de Bruno Retailleau. Mais non. Il s’agit de 50 «monsieur Tout-le-Monde». Intégrés dans la société. De tous les âges et de tous les milieux sociaux. Ce qui est presque plus effrayant encore. Et le pire, c’est que beaucoup d’entre eux ne comprennent pas où est le mal. A l’image de cet homme de 43 ans, père de cinq enfants, qui a affirmé ne pas savoir que se livrer à un acte sexuel avec une personne non consentante était un viol. Ou cet autre qui considère qu’il n’y a pas eu viol puisque la victime n’a pas refusé (elle était inconsciente car droguée, rappelons-le). Les bras nous en tombent. Et c’est là où l’on se dit que Gisèle Pelicot a eu sacrément raison d’insister pour que les débats de son procès soient publics. Car ils sont riches d’enseignements. Et vont permettre d’avancer à pas de géant – du moins il faut l’espérer – dans la lutte contre les violences sexuelles. Dans la prise en compte du consentement. Car, malgré les progrès effectués – sous la pression notamment des nombreuses associations engagées dans ce combat, saluons leur ténacité – il reste énormément à faire. En matière d’éducation déjà, les témoignages des 50 coaccusés en sont la preuve flagrante. Et en matière d’évolutions législatives : sur la définition du viol, sur la notion de consentement et sur le viol conjugal (trop d’hommes ne voient toujours pas où est le problème de réveiller sa femme pour satisfaire une envie sexuelle pressante). Il faut à tout prix que ces résolutions ne restent pas des vœux pieux. Qu’il y ait, dans la société française, un avant et un après Mazan. Que Gisèle Pelicot n’ait pas subi la présence et les interrogatoires de ses bourreaux ou les infâmes soupçons de complicité pour rien.