Déterminé. Raphaël Glucksmann l’a assuré à Libération : il se prépare pour 2027 et entend profiter des trois ans qu’il a devant lui pour reconstruire une gauche sociale-démocrate de gouvernement, «sociale, européenne, humaniste, écologiste et féministe». Le député européen aura l’occasion la semaine prochaine, date qu’il a choisie pour effectuer sa rentrée politique, de donner un aperçu de sa mue. Car il faut bien parler de mue pour celui qui n’a semblé jusqu’ici goûter les joies du combat politique que du bout des lèvres : deux candidatures aux européennes, à chaque fois dans un tango pas franchement collé serré avec l’appareil socialiste, avec entre les deux un mandat bruxellois à distance suffisante des flammes parisiennes. Sa première campagne fut saluée comme un coup d’essai réussi. Son mandat de député européen fut indéniablement sérieux, et lui a permis d’être identifié à une cause, celle des Ouïghours, et à un courant de pensée, la gauche réformiste qui sait devoir, pour gouverner, passer des compromis.
Sa seconde campagne le vit entrer d’un pied plus plain dans la bataille. Avec Jean-Luc Mélenchon et les insoumis, ils ne se sont rien épargné. Les ambiguïtés prorusses de l’ancien candidat à la présidentielle ont servi d’étincelle. Le refus du leader insoumis de qualifier de «terroriste» l’attaque du Hamas le 7 octobre a creusé un gouffre. Fort de ses 13,8 %, Raphaël Glucksmann en est surtout ressorti avec l’aura de celui qui, à défaut de tout déchirer, a redonné des couleurs à la social-démocratie. Assez pour en faire dès à présent le visage français de cette gauche de gouvernement ? Sur le fond, il coche pas mal de cases. Il devra tout de même convaincre que son utopisme raisonnable ne cache pas un réformisme trop mou. Il devra aussi démontrer qu’il est prêt à mettre les mains dans le cambouis, sur la durée, pour bâtir un vrai mouvement politique. C’est aujourd’hui un de ses points faibles : s’il a les réseaux intellectuels et d’experts pour travailler à une refondation programmatique de la sociale démocratie, il ne dispose pas des troupes d’élus ou de militants indispensables à tout destin présidentiel. Enfin, si son refus de la violence en politique a séduit à gauche cette partie de l’électorat horrifié par la fureur d’un Mélenchon, Raphaël Glucksmann devra aussi prouver qu’à défaut de devenir un homme politique comme les autres, il s’est tout de même un peu tanné le cuir.