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Libération
L'édito de Paul Quinio

Rassemblement national aux législatives : derrière les faux-semblants de la dédiabolisation

Quelques «brebis galeuses» ? Contrairement à ce que prétend Jordan Bardella, «Libération» a identifié plusieurs dizaines de candidats qui assument des propos aux antipodes de la vitrine dédiabolisée du parti d’extrême droite.
(Photos /DR.Maxppp.AFP)
publié le 4 juillet 2024 à 20h59

Il ne faut qu’une brebis galeuse pour gâter un troupeau. Si le proverbe dit vrai, plusieurs dizaines de moutons noirs gâtent assurément la stratégie de dédiabolisation mise en place par Marine Le Pen depuis qu’elle a évincé son père de la direction du parti d’extrême droite. Mercredi soir, Jordan Bardella a lui-même utilisé l’expression de «brebis galeuses» pour qualifier ces candidats RN épinglés par la presse, et notamment par Libération, pour leurs propos racistes, antisémites, homophobes, suprémacistes et autres horreurs qui peuvent tomber sous le coup de la loi. Sans oublier les complotistes et autres climatosceptiques de tous poils.

Le patron du RN a bien tenté de minimiser les dégâts en estimant que ces candidats se comptent sur les doigts d’une main. Ils sont en réalité plusieurs dizaines, certains déjà réélus, d’autres qui pourraient l’être ce dimanche. Il n’est pas inutile de rappeler ici qu’un député élu devient un représentant de la nation tout entière, pas seulement de ses électeurs, de sa formation politique ou encore moins de lui-même… Une version charitable pourrait expliquer que la présence de ces candidats qui considèrent que la saillie de Jean-Marie Le Pen sur l’holocauste «point de détail» de l’histoire n’est pas antisémite, ou qui estiment que les Maghrébins «n’ont pas leur place dans les hauts lieux». ne seraient que le signe d’une professionnalisation inachevée de la formation d’extrême droite. Ils sont en réalité les futurs ambassadeurs, écharpe tricolore en bandoulière, d’une identité politique dont les racines xénophobes sont profondes.

Si elles devaient s’étaler dans les travées de l’Assemblée nationale, le risque est évidemment immense – n’est-ce pas déjà le cas ces derniers jours – d’une libération dans la société tout entière de la parole et des actes racistes et antisémites. Derrière les faux-semblants du storytelling sur la dédiabolisation de la formation de Marine Le Pen et Jordan Bardella, ces dizaines et dizaines de brebis galeuses révèlent que le RN reste bien une menace pour les fondements de notre nation. Dont Jordan Bardella, s’il s’installait à Matignon, ne peut prétendre être le berger.