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Libération
L'édito de Dov Alfon

Reconnaissance d’un Etat palestinien : quel serait donc ce «moment utile» d’Emmanuel Macron ?

Gaza, l'engrenagedossier
Après l’effroyable bilan des frappes sur Rafah et alors que l’Espagne, l’Irlande et la Norvège ont franchi le pas, Paris continue de temporiser. Une position qui n’aide pas à faire pression sur Nétanyahou et in fine, n’encourage pas la paix.
Manifestation propalestinienne à Paris le 27 mai. (Geoffroy Van Der Hasselt/AFP)
publié le 28 mai 2024 à 21h14

Après la reconnaissance par plusieurs pays européens d’un Etat palestinien ce mardi, le président de la République, Emmanuel Macron, a expliqué que la reconnaissance par la France devait intervenir «à un moment utile». La question qui se pose immédiatement est : «utile» pour qui ?

L’armée israélienne a poursuivi mardi son assaut sur Rafah, quarante-huit heures après qu’une frappe aérienne y avait causé la mort d’au moins 45 réfugiés, dont de nombreux enfants. Si les circonstances exactes de cette tragédie ne sont pas encore claires, l’ordre de Benyamin Nétanyahou de lancer l’attaque contre Rafah, en riposte indirecte à un barrage de roquettes lancé samedi par le Hamas sur Tel-Aviv, en est forcément la cause directe. Mardi soir, comme pour le prouver, des informations faisaient état d’une autre frappe israélienne meurtrière non loin de là, faisant au moins 21 morts.

Face à cette tragédie sans fin, plusieurs pays européens ont décidé de reconnaître un Etat palestinien, espérant envoyer en cela un message fort à Israël sur les dangers de son isolationnisme, et un message fort de soutien à l’Autorité Palestinienne. L’Espagne, l’Irlande et la Norvège ont sauté le pas hier, tandis que le Danemark rétropédalait à la dernière minute, estimant que les «préconditions ne sont pas remplies».

Dans une interview à Libération, l’eurodéputé Bernard Guetta, numéro 2 de la liste de la majorité aux européennes, ne dit pas autre chose, estimant que pour accélérer une reprise des négociations menant à la coexistence de deux Etats, il serait souhaitable que la France reconnaisse la Palestine, mais «pas demain matin». Quel matin, alors ? Celui où cette reconnaissance «ne serait pas perçue comme une sanction contre Israël», explique Guetta.

«Je ne ferai pas de reconnaissance d’émotion», a insisté mardi soir Emmanuel Macron. Des centaines de milliers d’Israéliens continuaient hier de manifester contre Nétanyahou et son funeste gouvernement, désespérés eux aussi de l’impuissance mondiale à imposer une solution. En s’abstenant de proposer une alternative diplomatique crédible et de même envergure, la France fait surtout acte d’indifférence.