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Libération
L'édito d'Alexandra Schwartzbrod

Retailleau et Darmanin, un duo infernal

Aux manettes de l’Intérieur et de la Justice, les deux ministres de droite attisent la peur et la haine en se livrant à une surenchère anti-immigration. Une guerre d’ego qui n’a d’autre objectif que de se placer pour la présidentielle.
Les ministres de l'Intérieur, Bruno Retailleau, et de la Justice, Gérald Darmanin, le 3 décembre à l'Assemblée nationale. (Julien de Rosa/AFP)
publié le 11 février 2025 à 20h55

En plaçant Bruno Retailleau au ministère de l’Intérieur et Gérald Darmanin au ministère de la Justice, François Bayrou savait qu’il courait au devant des ennuis mais il n’imaginait sans doute pas que cela arriverait aussi vite. En gros, soit ces deux-là s’entredévoraient et on n’en parlait plus, soit ils rivalisaient dans la surenchère et alors la cohésion du «bloc central», comme on a fini par appeler l’alliance des droites et des macronistes, allait être difficile à tenir. Cela n’a pas loupé. L’un et l’autre se marquent à la culotte, utilisant le sempiternel thème de l’immigration pour mieux effrayer les Français, et le pays tout entier doit subir cette bataille d’ego et d’ambitions qui fracture le pays et abaisse le niveau des échanges politiques alors que la planète doit affronter des crises autrement plus sérieuses, climatiques, technologiques, géopolitiques et démocratiques. Et tant pis si, il y a plus de quinze ans, l’ouverture du débat sur l’identité nationale avait tourné court tant il charriait d’arrière-pensées nauséabondes, nos deux compères remettent ça pour tenter de chasser sur les terres du Rassemblement national.

François Bayrou n’ayant pas le poids politique pour siffler la fin de la récré, étant lui-même sur la corde raide, suspendu au bon vouloir de Marine Le Pen, Retailleau et Darmanin ne sont pas près de s’arrêter. D’autant qu’un troisième larron est en embuscade, Laurent Wauquiez, qui ronge son frein depuis si longtemps qu’il n’en peut plus, il sent la présidentielle se rapprocher et il se demande, observant la visibilité médiatique de Retailleau et Darmanin, s’il a vraiment bien fait de refuser d’entrer au gouvernement pour mieux se préserver. Car toutes ces gesticulations, tous ces coups de mentons et ces poings tapés sur la table, toutes ces peurs et ces haines attisées n’ont qu’un but, se positionner pour la présidentielle. Lundi matin, le député RN Laurent Jacobelli a publiquement appelé Bruno Retailleau à rejoindre les rangs de Marine Le Pen tant les positions du ministre de l’Intérieur sont proches des siennes. Ce n’est pas une mauvaise idée, ce serait le meilleur moyen de faire imploser la tête du parti.