La troisième fois aura été la bonne. Le nom de Sébastien Lecornu, fidèle parmi les fidèles d’Emmanuel Macron, avait circulé pour remplacer Gabriel Attal, puis Michel Barnier, avant que François Bayrou ne lui torde le bras avec, au bout, le succès que l’on connaît. Quel signe y voir sinon de l’immobilisme, celui d’un chef d’Etat qui persiste et signe dans sa volonté de ne rien changer de fondamental ? Et qui ne mesure pas vraiment le degré de la crise politique qu’il a ouvert par son incompréhensible dissolution en juin 2024 ?
Le timing de la nomination de Sébastien Lecornu, à la veille d’une journée qui pourrait signer les prémices d’une crise sociale, qui viendrait s’ajouter à la crise politique, laisse songeur. Certes, il a été reproché au chef de l’Etat de prendre précédemment un peu trop de temps avant de choisir son chef de gouvernement. Mais le signal envoyé, on change sans que rien ne change, ne pourra être que mal compris par ces Français, qui regardent depuis des mois défiler les Premiers ministres, au mieux dans l’indifférence, au pire avec colère, avec la conviction, en tout cas, que cela ne changera rien à leur quotidien.
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Le profil plutôt discret de Sébastien Lecornu n’est pas en cause. Son sérieux comme ministre de la Défense a été apprécié par la Grande Muette. Il faut, bien sûr, attendre de connaître la composition de son gouvernement pour mesurer le surplace que sa nomination risque de symboliser, mais tout de même : il est difficile de l’imaginer bousculer un Président qui en a pourtant besoin. Son arrivée à Matignon révèle qu’Emmanuel Macron manque décidément d’oxygène. Face à la crise, il se recroqueville dans un espace politique qui, chaque jour, ressemble de plus en plus à une cabine téléphonique. Il a pourtant besoin d’espace. De se redonner des marges de manœuvre. Mais non. En nommant Sébastien Lecornu, le chef de l’Etat confirme qu’il lui est impossible de retirer l’énorme œillère qui l’empêche de regarder vers sa gauche… Peu importe ce qui se passe autour de lui.