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Libération
L'édito de Dov Alfon

Soumission chimique : la prise de conscience du monde médical

Vigilance accrue, demandes de formation en hausse… Le procès des viols de Mazan, il y a un an, a servi de détonateur à une meilleure et nécessaire prise en compte de ce mode opératoire par les professionnels de santé.

Gisèle Pelicot. (Photomontage Libération/Alexandre Dimou. Reuters)
ParDov Alfon
Directeur de la publication et de la rédaction
Publié le 01/09/2025 à 21h12

La soumission chimique a longtemps eu un synonyme caché : «errance médicale». Sa définition comme mode opératoire d’agressions sexuelles, généralement par l’administration d’une substance à une personne pour notamment commettre des violences sexuelles, est maintenant établie et reconnue. On sait déjà que la «personne» agressée est une femme dans plus de 80 % des cas, et que ces cas sont probablement beaucoup plus nombreux que le chiffre du décompte officiel, 727 détections en 2021 et 1 229 cas diagnostiqués en 2022.

Mais un angle mort a longtemps été caché dans ce phénomène, et c’est le mur d’ignorance – ou de condescendance – auquel se sont heurtées les victimes en quête de réponses médicales à leurs symptômes. Il y a tout juste un an, Libé avait enquêté sur cette errance médicale sans fin, recueillant nombre témoignages de médecins et pharmaciens allant du «on n’a jamais eu de formation spécifique à ce sujet» au «je ne m’étais jamais posé la question en ces termes». Un an après le début du procès des viols de Mazan et l’électrochoc national qu’a causé le courageux témoignage de Gisèle Pelicot, les soignants ont-ils intégré ce mode opératoire dans leur champ naturel d’exploration ? Oui, nous disent nombre d’entre eux, et un autre nom monte immédiatement, celui de Joël Le Scouarnec, traumatisme encore plus violent pour la profession.

«Je suis allée chez un ami le cœur léger. J’en suis ressortie terrorisée : j’ai découvert un agresseur. Je comprends alors que j’ai été droguée à mon insu», avait déclaré dans l’hémicycle la députée Sandrine Josso, accusant ainsi publiquement le sénateur Joël Guerriau. Sa tribune dans Libé avait eu un grand retentissement. Nommée par le gouvernement en avril 2024 à la tête d’une mission avec la sénatrice Véronique Guillotin, elle a vu les recommandations de leur rapport vite adoptées. Le surgissement de nouvelles affaires, hélas, ne va pas diminuer de si tôt. La vigilance médicale est donc plus que jamais nécessaire.