Emmanuel Macron a donc changé d’avis. Lors de son premier quinquennat, le chef de l’Etat avait refusé de se prononcer sur le délicat sujet de la fin de vie. Dans l’interview qu’il a accordée à Libération et à la Croix, il ouvre enfin la voie à une modification de la loi pour donner «la possibilité de demander une aide à mourir sous certaines conditions strictes». Il acte donc que la loi Claeys-Leonetti ne permet pas «de traiter des situations humainement très difficiles […]. Il fallait donc aller plus loin.» Le Président refuse l’idée d’euthanasie. Prudent, il écarte de son vocabulaire l’expression de «suicide assisté» pour lui préférer celle d’«aide à mourir». Pourquoi pas. Mais cette précaution sémantique ne doit pas masquer l’importance de la prise de position du chef de l’Etat sur un sujet qui touche à l’intimité de chaque famille, brasse les convictions politiques ou religieuses de chacun, mais aussi des considérations éthiques ou philosophiques.
En donnant le top départ à une modification législative, Emmanuel Macron répond à une attente de l’opinion, favorable depuis longtemps dans les sondages à une évolution des pratiques. L’Elysée revendique néanmoins, pour répondre au reproche d’avoir traîné les pieds, d’avoir, avant de trancher, pris le temps de consulter, sonder, débattre avec les patients, les soignants, les représentants religieux, les élus, les spécialistes de l’éthique et autres experts. Est-ce à dire que l’examen d’un tel texte sera consensuel et qu’il sera adopté en deux temps trois mouvements ? Non. La fin de vie reste un sujet clivant. Il ne manquera pas de mobiliser les franges conservatrices du spectre politique et religieux. Mais une partie de la droite a évolué sur ces sujets sociétaux et éthiques, où se croisent comme rarement convictions personnelles et enjeux politiques collectifs. Les oppositions ne pourront donc pas avancer d’un bloc. Dit autrement : Emmanuel Macron s’avance sur un terrain délicat mais très «en même temps» compatible. Et une fois n’est pas coutume, on s’en réjouit.